Nous avions prévu un numéro thématique centré sur les dispositifs hybrides en classe de FLES. En rédigeant l’appel à contributions, nous nous sommes vite rendu compte que le nombre d’études dans le domaine était particulièrement limité et que les résultats de recherche en didactique du FLES étaient quasiment inexistants. Nous avons reçu plusieurs contributions qui portaient sur l’enseignement en ligne du FLES mais aucune ne semblait problématiser les spécificités de l’hybridation d’une formation pour l’enseignement du FLES. Nous avons donc décidé de réorienter le numéro sur six propositions de type Varia et nous laissons aux chercheurs et enseignants la possibilité de continuer à nous fournir des articles sur les dispositifs hybrides par le biais d’un appel en continu sur cette thématique.
Les contributions
Dans son article de recherche, Aleksandra Savenkova s’intéresse à la variation diatopique et sa perception positive ou négative par des enseignants pour l’enseignement du FLES. Pour ceci, elle a construit un protocole scientifique rigoureux : elle a demandé dans un premier temps à des locuteurs de catégoriser de courts extraits oraux (n = 12) de personnes issues de différentes aires linguistiques francophones (Suisse, Moselle, Réunion, Guadeloupe, Algérie, Québec, etc). Puis, ces mêmes extraits ont été proposés à des enseignants (n = 52) afin d’évaluer s’ils pouvaient envisager de s’appuyer sur ces derniers dans le cadre de leur enseignement de français. Les résultats montrent que de manière générale les enseignants sont favorables à l’intégration de la variation diatopique dans leur cours de français (76 % d’acceptation) et qu’ils pensent que ces extraits ont tout à fait leur place dans des manuels de FLE (83 % d’acceptation). Cependant, quelques accents sont moins bien accueillis comme par exemple l’accent du Cameroun (dans le groupe accent fort), l’accent suisse (dans le groupe accent léger) et l’accent Moselle (dans le groupe standard).
La contribution de Samira Khodadadi et de Rouhollah Rahmatian porte sur l’influence des outils en ligne sur la motivation des apprenants du FLE en Iran. En mobilisant un protocole de recherche simple, les auteurs ont évalué si l’utilisation d’un outil comme learningapps.org et thinglink.com pouvait influencer la motivation d’étudiants (n = 30) de niveau A2 inscrits à des cours de français en distanciel via Adobe Connect. Un questionnaire sur la motivation avec 30 questions a été distribué au groupe expérimental et au groupe de contrôle avant et après 20 sessions de formation. Les test-t indiquent clairement l’effet positif de l’outil sur la motivation des apprenants. Les auteurs proposent de ne pas se focaliser sur le discours ambiant négatif des apprenants concernant l’enseignement du FLE en distanciel mais d’étudier de manière précise comment motiver ces derniers par l’ajout d’outils en ligne pertinents.
Gérald Schlemminger propose de s’attarder sur les ceintures de compétences mobilisées dans la pédagogie institutionnelle (qui s’appuie en partie sur la pédagogie Freinet) afin de former des enseignants de FLE à l’université. Pour ce faire, il nous présente rapidement son dispositif de formation qui allie formation théorique (150 heures) et pratique de classe (60 heures) auprès d’enseignants novices qui assurent des cours de français (3h/semaine) pour des élèves de 6 à 12 ans (n = 12-15) par le biais de l’Atelier de français basé sur la pédagogie Freinet. À la fin des séances de cours, les enseignants sont invités à remplir une grille établie selon les principes des ceintures de compétences avec 7 thématiques (Planification du cours ; Stratégies d’enseignement ; Gestion du groupe classe ; Structuration du cours ; Matériel didactique et fiches ; Langue ; Comportement professionnel) et 4 niveaux de réalisation (de simple à complexe). Au final, les enseignants se forment à la pédagogie institutionnelle pour l’enseignement du FLE en mobilisant des techniques spécifiques auprès des élèves et en s’autoévaluant, comme les élèves, par le biais d’une grille basée sur les principes de la pédagogie institutionnelle.
Il n’est pas toujours aisé de trouver des outils numériques qui puissent être intégrés rapidement dans une classe de langue et Georgia Constantinou nous présente un outil, Plume, pour donner envie d’écrire aux élèves. Dans un premier temps, elle a établi une liste de caractéristiques de l’outil qu’elle pensait idéal puis elle a identifié l’application Plume proposée par le réseau Canopé de l’Éducation nationale française. Elle décrit ensuite les fonctionnalités principales comme la possibilité de créer des histoires à partir d’univers divers, les défis, le mot du jour ou les mini-jeux. Elle a finalement testé cet outil auprès de 20 jeunes apprenants (10-11 ans) de niveau A1 et nous livre les points positifs de cette expérimentation comme par exemple l’apprentissage du vocabulaire, la consolidation de l’orthographe et le plaisir d’écrire.
Yathreb Grira nous propose un compte-rendu du marché de l’enseignement-apprentissage du FLE en ligne en Tunisie et de son développement depuis la crise sanitaire. On entrevoit l’enthousiasme des apprenants qui peuvent suivre des cours de français plus facilement mais aussi leur désarroi face à des infrastructures en construction et du matériel informatique qui n’est pas toujours entretenu. Si les enseignants ont conscience des différentes composantes d’un enseignement en ligne réussi, il n’est pas toujours évident d’organiser un dispositif qui dépasse le seul synchrone et intègre de manière judicieuse les outils à leur disposition.
Dans sa note de lecture, Nathalie Gettliffe résume le dernier ouvrage de Claude Germain qui porte sur la didactologie des langues et la didactique de langues, deux disciplines qu’il entend distinguer. En reprenant certaines caractéristiques de ces dernières (objet d’étude, méthodes de recherche mobilisées, disciplines sources), elle tente de mettre en lumière les nouveaux contours de ces deux disciplines qui permettent de distinguer les métiers de didactologue, didacticien et enseignant de langues, ces deux derniers étant invités à collaborer régulièrement tant pour la construction de programmes d’enseignement de langues étrangères que pour les formations à l’enseignement.
Comme à notre habitude, nous vous souhaitons une bonne lecture de ces contributions émanant du monde entier et qui montre la diversité des thématiques de recherche et des pratiques en didactique du FLES.