Didactique du FLES, volume 2 numéro 1 – Les dispositifs hybrides en classe de FLES.

Direction du numéro

Nathalie Gettliffe et Laetitia Thobois-Jacob, université de Strasbourg, de Lorraine et de Haute-Alsace

 

La date limite de soumission est le 15 mars 2023
pour une publication avant l’été 2023.

Les propositions sont à envoyer à ngettliffe@unistra.fr et à jacobl@unistra.fr ainsi qu’à asso.rhenane.enseignants.fle@gmail.com.

La feuille de style se trouve sur le site de la revue à
https://ouvroir.fr/dfles/index.php?id=72.

 

Dès la fin des années 90, le lancement de plateforme pédagogique WebCT à Expolangues Paris marque le début de l’hybridation des formations. Plus récemment, sous l’effet des mesures de « continuité pédagogique » prises en contexte pandémique, de nombreux enseignants et formateurs ont été amenés à hybrider leurs pratiques d’enseignement et de formation et le champ du FLE/S n’a pas fait exception. Aujourd’hui, il semble nécessaire de faire le point sur des dispositifs pérennes qui ont été développés avant la crise sanitaire et les nouveaux dispositifs émergents en classe de FLE.

Les dispositifs de formation dits « hybrides » articulent « à des degrés divers des phases de formation en présentiel et des phases de formation à distance, soutenues par un environnement technologique par exemple une plate-forme de formation » (Charlier, Deschryver et Peraya, 2006). Cette définition francophone fait aussi consensus dans le domaine anglo-saxon qui réitère l’importance d’une alternance entre des phases de formation proposées dans un bâtiment « en dur » (brick-and-mortar location) et des moments de formation assurés à distance qui incluent une certaine flexibilité de temps, de lieu, de parcours et/ou de rythme pour l’apprenant (Graham, 2006 ; Horn et Staker, 2011).

Les premières recherches se sont centrées sur des comparaisons entre dispositifs d’enseignement traditionnel et dispositifs hybrides sans véritablement caractériser ces derniers qui peuvent recouvrir une multitude de formes (Burton et coll., 2011). Ainsi, si les dispositifs hybrides semblaient apporter une plus-value dans les apprentissages, il restait difficile d’identifier la ou les variable(s) responsable(s) des changements positifs pour des aspects aussi variés que la motivation, la collaboration, le transfert de compétences vers le milieu professionnel, etc. (Docq, Lebrun et Smidts, 2008).

Les travaux issus du projet de recherche européen Hy-Sup mené de 2009-2012 ont permis d’établir une typologie à partir du recensement des différentes formes en pratique dans l’enseignement supérieur (Burton et coll. 2011). Aussi, le degré d’hybridation d’un dispositif donné peut être caractérisé selon la manière dont il mobilise les cinq dimensions constitutives des dispositifs hybrides de formation : 1) son articulation présence/distance ; 2) sa médiatisation ; 3) sa médiation ; 4) son accompagnement ; 5) son ouverture (Peraya, Charlier et Deschryver, 2014). Enfin, ces travaux ont également mis en lumière les effets perçus par les différents acteurs (étudiants, enseignants et responsables institutionnels) en termes d’apprentissages, de pratiques d’enseignement et de développement institutionnel (Deschryver et Lebrun, 2014).

Dans le domaine anglo-saxon, la typologie la plus populaire repose sur les descriptions de Horn et Staker (2011) qui se centre sur deux variables d’ajustement (le lieu et la modalité – distanciel/présentiel). D’autres propositions (Mirriahi, Alonzo et Fox, 2015) se rapprochent de la typologie francophone en incluant des axes tels que les ressources, les activités et l’accompagnement. Comme le note Peltier et Séguin (2021) dans leur dernier article de synthèse, il est nécessaire de définir avec précision le dispositif hybride et ses soubassements ingéniériques avant de pouvoir conclure sur les effets de tels dispositifs tant sur la nature que sur la qualité des apprentissages qui y sont réalisés.

Concernant l’apprentissage et l’enseignement des langues secondes s’appuyant sur des dispositifs hybrides, des démarches d’ingénierie ont été proposées afin d’articuler présentiel et distanciel au regard des compétences à développer (Nissen, 2019 ; Anderson, 2018). Cependant, la mise en place de tels dispositifs se heurte à des limitations en termes de ressources humaines (Burrows et Miras, 2019) puisque des ingénieurs pédagogiques sont souvent nécessaires pour développer des dispositifs hautement scénarisés centrées autour de tâches communicatives et que l’accompagnement incombe régulièrement à des personnels contractualisés (tuteurs en ligne) souvent peu reconnus. Pour les apprenants, les résultats en terme d’efficacité semblent mitigés (Rubio, 2012) et dépendent largement des choix pédagogiques opérés lors de la conceptualisation du dispositif. Pour les enseignants, ce sont régulièrement des contraintes institutionnelles (nombre d’apprenants trop importants en classe de langue ; réduction du personnel) qui sont le moteur de transformations pédagogiques subies plutôt que proposées (Bruderman, 2010 ; McAlliser et Narcy-Combes, 2015 ; Hamel, 2017). Les dispositifs hybrides s’en trouvent appauvris même si de nouvelles dénominations telles que la classe inversée (Russel et Murphy, 2021 ; Wu et coll., 2017 ; Yang et al. 2018) ou de nouvelles pratiques (la comodalité) semblent remobiliser le corps enseignant pour expérimenter une forme particulière d’articulation temporelle.

De manière générale, de nombreux angles morts subsistent dans les études portant sur les dispositifs hybrides et plus particulièrement en langues. Rares sont les expérimentations qui s’appuient sur l’enseignement du français (Méar Garcia, 2013). Les technologies étant un élément important des dispositifs hybrides, il conviendrait aussi de réinterroger certaines pratiques à l’aune des développements récents ou massifiés (comme la visioconférence). Comme le notent Wang et Han (2015), les enseignants sont très peu interrogés sur leur vécu et ce que ces transformations numériques impliquent dans leur développement professionnel. L’aspect méso (institutionnel) apparait de manière exceptionnelle et mériterait d’être abordé suite aux mesures de continuité pédagogique qui ont été plus ou moins pérennisées dans l’après-COVID.

Ce numéro thématique se propose de rassembler des travaux de recherche portant sur la conception, la mise en œuvre de dispositifs hybrides dédiés à l’enseignement et à l’apprentissage du FLE/S. Les contributions attendues pourront s’appuyer sur des modèles théoriques et/ou des outils numériques, mais aussi sur des retours d’expérience traitant plus précisément des processus d’enseignement et d’apprentissage en contexte de dispositifs hybrides dans toute leur diversité.

Il s’agira d’analyser par exemple :

  • les formes, méthodes, outils et pratiques existant(e)s dédié(e)s à la conception, à la mise en œuvre et à l’évaluation d’un dispositif hybride en FLE/S ;
  • les approches pédagogiques ayant favorisé la mise en place de ces dispositifs hybrides ;
  • les différentes transformations pédagogiques résultant d’une hybridation ;
  • les impacts induits par les dispositifs hybrides pour les enseignants et/ou les apprenants (gestion du temps, organisation spatiale et ou temporelle, motivation ou interactions entre acteurs, apprentissages, pratiques collectives et individuelles d’enseignement et/ou d’apprentissage) ;
  • les motivations de chacun des acteurs impliqués…

Bibliographie

Anderson, H. (2018). Blended basic language courses: Design, pedagogy, and implementation. Routledge.

Brudermann, C. (2010). Analyse de l’efficacité des stratégies de travail d’étudiants Lansad à distance dans un dispositif hybride — Étape d’une recherche-action », Alsic, 13. doi.org/10.4000/alsic.1348.

Burrows, A. & Miras, G. (2019). Pratiques numériques en langues : de la verbalisation à l’analyse des préoccupations enseignantes. Alsic, 22. https://journals.openedition.org/alsic/3549.

Burton, R., Borruat, S., Charlier, B., Coltice, N., Deschryver, N., Docq, F et Villiot-Leclercq, E. (2011). Vers une typologie des dispositifs hybrides de formation en enseignement supérieur. Distances et savoirs, 9(1), 69-96.

Charlier, B., Deschryver, N. et Peraya, D. (2006). Apprendre en présence et à distance. Une définition des dispositifs hybrides. Distances et Savoirs, 4, 469-496.

Deschryver, N. et Lebrun, M. (2014). Dispositifs hybrides et apprentissages : effets perçus par des étudiants et des enseignants du supérieur. Éducation et Formation, e301, 75-95.

Docq F., Lebrun M. et Smidts D. (2008). À la recherche des effets d’une plate-forme d’enseignement/apprentissage en ligne sur les pratiques pédagogiques d’une université : premières approches, Revue internationale des technologies en pédagogie universitaire, 5(1), 45-57. http://www.ritpu.org/IMG/pdf/RITPU_v05n01_45.pdf.

Graham, C. (2006). Blended learning systems: definition, current trends, and future directions. Dans C. Bonk et C. Graham (dir.), The handbook of blended learning: Global perspectives, local designs (p. 3-21). Pfeiffer Publishing.

Hamel, M.-J. (2017). Portraits d’enseignants de FLS, pédagogues de l’hybride. Vers une ébauche de modèle, Alsic, 20(3). doi.org/10.4000/alsic.3138.

Horn, M. et Staker, H. (2011). The rise of K-12 blended learning. Innosight institute, 5, 1-17.

McAllister, J. et Narcy-Combes, M.-F. (2015). Étude longitudinale d’un dispositif hybride d’apprentissage de l’anglais en milieu universitaire — Le point de vue des étudiants, Alsic, 18(2), doi.org/10.4000/alsic.2858.

Méar Garcia, S. (2013). Un dispositif hybride pour l’enseignement du FLE : conception, mise en œuvre et effets sur la motivation des apprenants. Dans Dejean-Thircuir, C., Mangenot, F., Nissen, E. et Soubrié, T. (dir.). Actes du colloque Epal 2013 (Échanger pour apprendre en ligne) (p.1-17). Université Grenoble Alpes.

Mirriahi, N., Alonzo, D. et Fox, B. (2015). A blended learning framework for curriculum design and professional development. Research in Learning Technology, 2015(23). doi.org/10.3402/rlt.v23.28451.

Nissen, E. (2019). Formation hybride en langues : Articuler présentiel et distanciel. Didier.

Peltier, C. et Séguin, C. (2021). Hybridation et dispositifs hybrides de formation dans l’enseignement supérieur : revue de la littérature 2012-2020. Distances et médiations des savoirs, 35. https://journals.openedition.org/dms/6414.

Peraya, D., Charlier, B. et Deschryver, N. (2014). Une première approche de l’hybridation. Éducation et Formation, e-301, 15-34.

Rubio, F. (2012). The Effects of Blended Learning on Second Language Fluency and Proficiency. Dans Rubio, F., Thoms, J., Katz Bourns, S. (dir.) Hybrid Language Teaching and Learning: Exploring Theoretical, Pedagogical and Curricular Issues (p.137-159). Heinle.

Russell, V. et Murphy-Judy, K. (2021). Teaching language online: A guide to designing, developing, and delivering online, blended, and flipped language courses. Routledge.

Wang, Y., Han, X. et Yang, J. (2015). Revisiting the Blended Learning Literature: Using a Complex Adaptive Systems Framework. Educational Technology & Society, 18 (2), 380–393.

Wu, W., Hsieh, J. et Yang, J. (2017). Creating an online learning community in a flipped classroom to enhance EFL learners’ oral proficiency. Journal of Educational Technology & Society, 20(2), 142-157.

Yang, J., Yin, C. et Wang, W. (2018). Flipping the classroom in teaching Chinese as a foreign language. Language Learning & Technology, 22(1), 16-26.

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