Communauté et immersion au prisme de l’intégration de l’individu : le personnage de Vincent Macaigne

DOI : 10.57086/radar.314

Abstract

Cet article traite des questions de l’immersion liée à la communauté sous l’angle de l’individu et en adoptant un médium bien spécifique : le cinéma. Il prend pour sujet l’acteur Vincent Macaigne et plus spécifiquement le personnage bien particulier qu’il incarne au cinéma, que je nomme le naufragé. Via les notions d’acteur, de vedette et de star, nous verrons qu’un avatar unique peut provoquer l’empathie d’un groupe et créer une commune expérience esthétique et sociétale. Ce personnage concentre l’attention de tous et, ce faisant, il exprime sa parole à la foule assemblée. Or chacun le sait, nous sommes tous porteurs d’une parole, et c’est ainsi que nous traiterons de la notion de « claim » développé par le philosophe Stanley Cavell. La parole de l’individu construit son identité et lui permet de s’inscrire et de s’intégrer au sein d’une communauté. Le personnage du naufragé qu’incarne régulièrement Vincent Macaigne représente ainsi la difficulté hypermoderne d’exprimer le « soi » à autrui, ainsi que la tâche ardue qui est devenue celle de la construction personnelle et collective de nos individualités et de nos individuations.

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Nous sommes tous constamment immergés dans de multiples contenants. Ne le sommes-nous pas quand, alors que nous nous installons devant un écran afin de visionner une œuvre filmique, nous entrons dans une nouvelle position de pure perception audiovisuelle ? Dans cet article, nous allons aborder le phénomène de l’immersion sous l’angle du cinéma, en tentant à partir d’un exemple précis d’observer de quelle manière les artistes s’emparent des questions de marginalité et d’intégration de l’individu dans la société qui l’entoure. Les artistes ici seront donc les hommes de cinéma, et plus particulièrement l’acteur, qui tel un passeur endossera la mission de représentation d’un archétype. L’idée ici sera donc de traiter les questions d’immersion non pas tant sous l’angle technique et technologique, mais à la lumière de sa représentation, de sa suggestion par sa monstration. L’interface d’immersion technique, bien entendu, restera l’écran qui accueillera la projection ou diffusera le contenu multimédia. Il s’agit d’interroger l’immersion à l’échelle de l’individu, mais également l’immersion collective au sein d’un système sociétal. Il reviendra à une question élémentaire : est-ce qu’on ne s’adapte pas assez à la société, ou bien est-ce la société qui ne nous adopte pas assez ? Voyons donc, comment le cinéma questionne la volonté des individus d’esquisser des espaces-temps partagés.

Le naufragé

Depuis une dizaine d’années, et un peu plus même, un nouveau personnage s’est imposé sur les écrans de cinéma français. On peut dire de lui qu’il est en retrait du monde, qu’il vit mal ce retrait, qu’il est un « perdant »1 du monde contemporain, qu’il expérimente un sentiment d’échec : il est un séducteur maladroit, un trentenaire aux accents burlesques, une sorte de perdant magnifique. On retrouve en lui une résurgence des thèmes et des personnages que le Romantisme révélait : il véhicule et figure un sentiment d’échec, l’impuissance à imposer des valeurs authentiques dans une société dominée par l’argent, le « mal du siècle », la désillusion face au monde, le culte du sentiment amoureux, le repli sur soi et l’exaltation des sentiments intimes. Il est un homme sensible, auquel son destin échappe, et dont la société nie les aspirations. Cela transparaît dans sa façon d’être, son ennui, son désœuvrement, son désespoir. Je nomme ce personnage le « naufragé » en hommage à l’image littéraire qu’il fait naître en mon esprit.

Le terme naufragé désigne en effet, par métonymie, la personne qui se trouve à bord d’un bateau faisant ou ayant fait naufrage. Au sens figuré, le terme désigne un individu ruiné, qui sombre dans un désastre. Un emploi plus rare et littéraire du terme signale une entreprise de ruine, qui conduit à la perte d’un objet. Je garde de ces idées la suivante : le naufragé est l’individu mortel abandonné à son sort, seul ou en groupe, hors d’un cadre communautaire précis, en proie à des difficultés, cadre symbolisé par le navire en déroute, et luttant contre les éléments dans le but d’atteindre le rivage, un nouveau cadre de vie, une saine et sûre forme d’être au monde2. J’emprunte le terme de naufragé à certains films dans lesquels apparaît notre personnage d’étude : Le naufragé (Guillaume Brac, 2009), Marie et les naufragés (Sébastien Betbeder, 2016), Guillaume à la dérive (Sylvain Dieuaide, 2015). Tous ces personnages ne sont jamais mis en scène perdus au milieu de l’océan à la recherche d’une terre ou d’un navire accueillant. Bien au contraire, notre naufragé a toujours les pieds rivés sur la terre ferme. Il comporte cependant les symptômes et les caractéristiques qui font l’essence du malheureux naufragé. Perdu, vivant ou échappant à un cadre de vie devenu inconvenant, qui est symboliquement le bateau coulant ou coulé, inconfortablement installé dans l’eau ou sur un radeau devenu symbole de la condition humaine, il cherche à s’en extraire dans le but d’atteindre un nouvel espace, un nouveau cadre de vie plus serein ou propice à son épanouissement.

Notre naufragé a la particularité d’être incarné dans l’habit d’un personnage. Aussi, il répond et actualise les prérogatives qui incombent traditionnellement à cette instance : il imite et représente selon les règles de la mimésis en portant la voie de son masque, de sa persona au public assemblé. Qui plus est, il est un personnage lié à l’art cinématographique, ce qui lui enlève et offre plusieurs modalités, pouvoirs et caractéristiques, qui ne sont pas celles du personnage graphique ou littéraire. La caractéristique majeure du personnage de cinéma est liée à l’essence même de ce médium. Le cinéma, ontologiquement, est le processus qui met en mouvement des images photographiques.

L’acteur, le personnage, la vedette et la star

Vincent Macaigne est l’acteur représentatif et représentant le naufragé. Il lui offre son corps, sa parole et son être pour l’incarner. Avant d’entamer une carrière, non exclusive, d’acteur de cinéma, ce dernier a suivi une formation d’acteur et de metteur en scène de théâtre. Il a commencé par apparaître dans de multiples courts-métrages à la fin des années deux-mille, et occupait des seconds rôles dans certains longs-métrages. C’est véritablement à partir des années 2010, jusqu’à aujourd’hui encore, que sa carrière de vedette débute, et notamment grâce à un rôle (de naufragé) dans Un monde sans femmes de Guillaume Brac en 2011. On observe que dans cette seconde décennie du xxie siècle, la quasi-totalité de ses interprétations sont des rôles de naufragé. Son parcours cinématographique se marie avec une nouvelle génération de cinéastes français, qui ont, grossièrement, pour point commun de travailler avec l’acteur Vincent Macaigne et d’avoir été regroupés dans un numéro de la revue Les Cahiers du Cinéma en 20133. Les films mis en avant dans ce numéro sont notamment La fille du 14 juillet (Antonin Peretjatko, 2013), La bataille de Solférino (Justine Triet, 2013) et Tonnerre (Guillaume Brac, 2013), et parmi cette nouvelle génération, on compte Sébastien Betbeder, Guilhem Amesland, Louis Garrel ou encore Armel Hostiou. Vincent Macaigne, vedette de cinéma qui peut admettre le qualificatif de « star »4, même si dans son cas nous sommes très éloignés du « star-system » hollywoodien. Il est donc le liant de tous ces cinéastes en plus d’être l’acteur principal, et même le créateur dans la mesure ou celui-ci contribue au processus de mise en forme de l’œuvre, du naufragé. Il est le naufragé, de la même manière que Clint Eastwood est le cow-boy typique états-unien ou que Jean Gabin est l’ouvrier populaire du début du siècle.

Photogramme issu du film Tonnerre.

© RECTANGLE PRODUCTIONS – Wild Bunch – France 3 Cinéma

Le cinéma participe du pouvoir qu’on les transcriptions photographiques de la réalité de nous présenter leurs originaux, impossibles à distinguer dans tous les aspects particularisables de l’objet précis placé à l’origine devant le mécanisme de la caméra ; et c’est ce trait du moyen d’expression photographique qui contribue à expliquer pourquoi l’acteur prédomine sur le personnage dans le jeu cinématographique. Car, quel que soit le personnage que joue Garbo, la caméra transcrit ou enregistre l’accent sur sa réalité physique de chair et de sang5.

Quand l’acteur devient une star et quand celui-ci est lié à un type particulier de personnage, il devient en quelque sorte ce personnage en lui prêtant, en lui léguant et en lui faisant don de son être. Le naufragé récupère et utilise les caractéristiques corporelles et comportementales de Vincent Macaigne comme des matériaux de son identité et de sa virtualisation, un peu plus au fur et à mesure des films et des œuvres les réunissant. Ainsi, la persona du naufragé est aussi, par le pouvoir de captation cinématographique, celle de Vincent Macaigne.

La persona est, comme le disait Parker Tyler, de cette charade que l’acteur, et surtout l’acteur célèbre, joue à être, au sens ou ses rôles successifs (« mon premier, mon deuxième… ») construisent ensemble une image totale6.

En interprétant toujours le même rôle du naufragé dans chaque film de cette mouvance cinématographique, il constitue par son jeu d’acteur le liant moral et physique de tous ces personnages, qui ont désormais un « air de famille ». Cette notion de ressemblance de famille, empruntée au philosophe Ludwig Wittgenstein, « permet de grouper des variantes en un personnage du même nom, quelques différentes que soient les versions7. »

L’air de famille n’est pas une somme finie de traits communs. Il est fait de ressemblances unissant de proche en proche l’un et l’autre des membres d’une famille, qui permettent de circuler entre eux de manière métonymique plutôt que métaphorique. Par exemple : un style voisin de démarche ou d’élocution, des manières analogues de se tenir ou de se vêtir, de grimacer, de sourire ou de soupirer, tout ce que Leibniz appelle le je ne sais quoi qui fait reconnaître une appartenance8.

La parole personnelle et publique, ou le « claim »

Dans sa théorie de philosophie morale, le philosophe états-unien Stanley Cavell explique que tout un chacun, et les personnages aussi donc, porte en soi un Claim. Je m’autorise à utiliser ce terme anglais car le concept qui lui est lié n’est pas traduisible en français sans occasionner une grande perte de sens. En effet, on pourrait traduire claim autant par « prétendre, « revendiquer », que « demander », qui sont vous en conviendrez trois mots aux implications et finalités bien différentes. Je résumerai ce concept comme étant la parole, sociale, politique, humaine qu’un individu porte en lui et énonce à la société. Le claim est la parole comprise comme un genre d’acte politique dans la cité.

Les différents sens de « claim », de l’actif au passif, de « revendication », « prétention » à « raison de » ou « voix » sont autant de prismes à partir desquels Cavell met en question la rationalité. The claim of reason accomplirait une vaste interrogation de la raison dans tous ses états (revendicatif, raisonnant, doutant…). « Claim » rend compte, tout d’abord, de ma prétention à parler pour nous ; ma « voix » politique. La « voix » pose la question de la représentativité démocratique en tant que rapport que nous établissons à la fois avec autrui, avec un gouvernement, et avec moi-même9.

Dans d’autres sens, la voix (claim) désigne également une prétention à la rationalité (« claim to rationality »), elle représente les aspirations de la raison à exprimer sa propre adéquation avec le monde ; le claim désigne enfin les prétentions de la raison (« claim of reason »). Cette notion de claim est tout à fait intéressante et appropriée à l’étude du naufragé. En effet, nous l’avons vu en introduction, il est un personnage plutôt maladroit et malhabile, qui a du mal à s’inscrire dans la communauté qui l’entoure immédiatement. Il éprouve une difficulté à énoncer sa parole, son claim.

Parfois il ne s’exprime pas du tout, parfois il se fait mal comprendre et profère des paroles inintelligibles ou inadéquates. Ces situations, souvent comiques, parfois dramatiques, sont le lot quotidien du naufragé qui affronte dans chaque œuvre la difficulté d’exprimer totalement son claim, et pâtit de l’échec de cette opération. Ces échecs apparaissent bien sûr dans différents contextes et différentes situations, qui, toutefois, se ressemblent. Les milieux sociaux sont similaires (le naufragé est toujours un individu français « moyen »), l’ancrage spatio-temporel est le même (les fictions se déroulent sur le territoire français rural, et même en Guyane dans La loi de la jungle) et l’objet des confrontations est toujours lié à l’amour d’une femme et la rivalité, l’âgon qui lui est corrélatif. Voici quelques exemples : dans la séquence d’introduction de La bataille de Solférino (Justine Triet, 2013), en tout début de fiction, Vincent Macaigne tente de s’introduire chez son ancienne compagne afin de visiter ses enfants en bas âge. Or, il n’a pas le droit de rentrer dans le domicile si son ex-compagne n’est pas présente. Aussi, alors qu’il s’est introduit dans l’appartement, un voisin prévenu vient le tirer à l’extérieur. La scène nous montre un naufragé pitoyable, qui se laisse dicter sa conduite par un étranger devant ses filles, et qui est incapable d’expliquer qu’il est désormais autorisé par une lettre de la juge à visiter ses filles. Il s’énerve et balbutie dans la même minute, et, sans aller jusqu’aux coups, il entre en confrontation physique avec le voisin, mais abdique rapidement. Mis dans une situation délicate en lien avec sa famille nucléaire, il ne parvient pas à énoncer et encore moins à faire entendre son « claim », ni au voisin, ni au baby-sitter. Il résulte de cette situation un pathétique élevé, mêlé à une certaine humiliation du naufragé.

Dans 2 automnes, 3 hivers (Sébastien Betbeder, 2013) il tente de sauver une femme victime d’agression, et échoue en se retrouvant planté d’un couteau. La scène est toutefois comique, le naufragé raconte a posteriori l’aventure, et des images du malheur habillent l’écran dans un flash-back nocturne. Il déclare : « Il y a deux hommes, capuche sur la tête, tenue de sport noir, et, et, une jeune femme. La jeune femme tente de se défaire de l’emprise de ces deux ninjas. Je les interpelle. Une sorte d’onomatopée bizarre sort de ma bouche. (son in dans le flashback)« Hé ho hé… » bon, c’est rond, et pas très viril hein. ». Le courage du naufragé ne parvient pas à prendre forme et il en résulte de cette mission de sauvetage un échec. À force de sortir diminué de telles situations, l’aura pitoyable du naufragé s’agrandit, et ce cercle vicieux le fait adopter des stratégies « suicidaires » sans espoir. Ainsi dans Une histoire américaine (Armel Hostiou, 2015), il part à New York dans l’espoir de reconquérir son ex-compagne Barbara, qui ne veut plus de lui. Quand la narration atteint son climax, le naufragé arrive chez Babara et attend cette dernière en compagnie de son nouveau compagnon. Vincent s’exprime mal en anglais, son visage est couvert de sparadraps et de sang, et joue néanmoins la provocation avec son hôte. Quand Barbara lui demande « Vincent qu’est-ce que tu veux ? », il répond « Tu vas bien ? », et après un silence prononcé, il se met à genoux et, armé d’une bague, il lui demande sa main. Le plan suivant, opéré via une coupe nette, le montre sortir du bâtiment en pleur. Son claim est non énoncé, et s’extériorise finalement dans un geste désespéré.

Photogramme issu du film 2 automnes, 3 hivers.

© UFO Distribution

En résumé, le propos, le claim est mal exprimé, inintelligible, et quand bien même l’essence de son propos est entendue, il essuie un refus de la part de l’interlocuteur. La catastrophe d’incommunicabilité que traverse le naufragé l’empêche de prendre en main son destin et le condamne à subir les aléas de son destin ; il ne peut ni, tel Karl Marx, transformer le monde, ni, comme Arthur Rimbaud, changer la vie, tant qu’il n’énoncera pas sa parole intérieure proprement. Sans doute le naufragé aurait dû entendre et appliquer le dicton suivant « Tout ce qui peut être dit peut-être dit clairement, et sur ce dont on ne peut parler, il faut garder le silence »10, mais alors il n’y aurait eu ni films, ni article sur ce sujet.

Naufragé et construction identitaire, la difficulté à dire le soi

Le naufragé extériorise mal sa parole et son être au monde donc. Peut-être est-ce précisément car son « être au monde » est bancal, lésé, fragile ? Voyons d’abord ce que recouvre le terme « être au monde ». Souvent utilisée dans le débat public par de nombreux discoureurs, l’ambiguïté de cette expression est sans échelle marquée dans tout le monde connu. Être au monde, locution relativement récente au regard de l’histoire des civilisations, voit sa paternité revenir au philosophe Martin Heidegger ; ce dernier l’utilisait pour désigner un être vivant découvrant le monde. L’individu humain, un « être étant au monde » (dasein) découvre constamment le monde, et se forge à partir de ses apprentissages et de ses expériences un mode de vie qui lui permet de se construire une identité et à dire son être. La représentation qui est faite du naufragé nous montre effectivement un personnage dont l’être au monde n’est pas idéal, sans pour autant nous présenter un cas typique, trop stéréotypé ou trop exceptionnel pour que sa situation ne dépasse jamais ou rarement la toile de cinéma. À cet égard, il est à l’image des premiers grands comiques cinématographiques que sont Charlie Chaplin, ou plutôt Buster Keaton.

L’être au monde sous-entend une relation entre l’individu et le monde qu’il habite, littéralement le sujet est au monde, et cette relation est partiellement brisée, notamment car la parole ne se transmet pas ou plus avec l’idéale aisance qu’on attribue symboliquement aux sociétés utopiques dans lesquelles l’être humain ne serait plus un être humain. Mon point de vue est que la vie n’est pas facile11, et encore moins un long fleuve tranquille : le cerveau humain néo-mammalien reste relativement primitif et face à chaque difficulté que la vie nous propose, que nous luttions, que nous fuyons ou que nous inhibions toute action12, nous jugerons toujours les épreuves comme difficiles. L’être au monde de tout un chacun ne sera jamais idéal. Il n’est pas question de s’apitoyer sur le sort d’un personnage fictif, mais plutôt de mettre en lumière les conditions de sa situation.

La première raison de l’écart qui sépare le naufragé d’une forme de vie épanouissante est la crise du langage qu’il traverse. Le naufragé, nous l’avons vu, exprime mal son « claim », et parfois même s’engouffre dans des situations explosives qui seraient si simplement résolues par l’usage raisonné du discours et de la discussion. Un exemple extrême se trouve dans Tonnerre (Guillaume Brac, 2013), alors que le naufragé menace son rival amoureux d’une arme de poing de petit calibre, pour une histoire de texto. La crise du langage ouvre le cercle ancestral de la violence et de la vendetta. Pourtant, Stanley Cavell avait bien noté cette formidable capacité qu’a l’être humain à s’accorder dans le langage : « Ce qui est stupéfiant, et qui provoque à l’activité philosophique sur le sujet, c’est de constater à quel point cet accord est intime et exhaustif; à quel point nous communiquons, par le langage, vite et bien13 ». La communication interhumaine ne passe pas uniquement par la voix, mais peut aussi transiter par d’autres chemins plus sanguins voire spirituels : voyez les formes de communications corporelles, les langues des signes, la danse, etc. Eh bien, le naufragé expérimente également la rupture « sensori-motrice », caractéristique du cinéma moderne d’après Gilles Deleuze, qui empêche l’accession de sa voie au monde. Une scène marquante, qui à elle seule représente le moyen-métrage Un monde sans femmes, et qui lui a valu ses nombreux prix, montre le naufragé, Vincent Macaigne, seul et côte à côte avec la femme qu’il courtise. Au bout de deux longues minutes de silence, il lui attrape maladroitement les trois doigts de la main. Elle lui dit alors : « Je pense que tu serais un bon père. Un bon mari aussi. — Ah bon ? – Je pense que tu pourrais rendre une femme heureuse. – C’est vrai ? Ha tu crois… » et elle décide finalement de partir en soupirant.

Certains délèguent à une partie de leur corps le message qu’ils ne peuvent énoncer directement. La dynamique expressive passe alors non pas dans une parole énoncée (logos), mais dans une affection corporelle. Le paradoxe est maximal quand l’affection corporelle atteint les capacités d’énonciations. […] Les difficultés de […] parler, les toux, les aphonies, les dysphonies et bégaiements témoignent presque toujours d’un refus d’exigences imposées au sujet. Elles sont un refus de la forme de vie obligée ou prescrite14.

Il semble même que parfois, et je devrais dire souvent, le naufragé ne communique pas, ou bafoue quelques syllabes inintelligibles proprement car elles sont dénuées de sens. Dans le dernier exemple, issu d’Un monde sans femmes, et dans la majorité des films ou apparait le naufragé et Vincent Macaigne, jusque dans, mais dans une autre mesure, le récent Chien (Samuel Benchetrit, 2018) notre acteur ne parvient pas à se faire comprendre et n’a bien souvent rien à faire comprendre. En fait, pour être plus précis, car il s’agit ici d’affect, de sensations spectatorielles et d’idées esthétiques, il me semble que le naufragé n’arrive non seulement pas à exprimer clairement sa parole, mais aussi à la saisir lui-même, à concevoir entièrement son énoncé humain, son « claim ».

Il n’est pas aisé de savoir « ce que nous voulons dire », ni de « vouloir dire » ce que nous disons (Mean What We Say) et c’est là un élément essentiel de la pensée du langage ordinaire. Que le langage me soit donné n’implique pas que je sache, a priori, comment je vais m’entendre, m’accorder dans le langage avec mes co-locuteurs. Et c’est la réponse définitive à la community view et à ceux qui cherchent chez Wittgenstein l’idée de fonder des explications ou des justifications (morales, sociales, scientifiques) par les pratiques existantes. Le recours à la notion de communauté n’est en rien, chez Wittgenstein, une solution15.

Bien souvent le naufragé semble ne pas se comprendre lui-même. Il agit parfois comme un enfant, avec une impulsivité autant héroïque qu’infantile, quand il défend une dame contre des assaillants munis d’armes blanches, ou quand il tente de séduire la mariée lors de son mariage (Le sens de la fête, 2017). Le naufragé adopte bien souvent la posture du héros romantique, dans sa facette la plus française, insouciante et irréaliste. Je m’explique ; le naufragé est un héros romantique en ceci que, à l’instar de ces derniers, il s’insatisfait du présent et se met en quête d’autres choses. Il est un individu plus qu’un archétype, d’où la systématique présentation de sa personne comme un homme sensible, auquel son destin échappe et dont la société nie les aspirations. L’expérimentation de la « maladie de la vie » et de l’ennui trouble le naufragé, comme elle avait troublé les romantiques16. Le naufragé est également un héros français car, au-delà de la nationalité de l’acteur et l’origine des productions filmiques dans lesquelles il apparaît, il est porteur des caractéristiques proprement françaises, comme l’a remarqué Henri James17. Le théoricien du cinéma Laurent Jullier explique également que :

À cet égard, une différence conceptuelle entre les grandes œuvres du cinéma européen et celles du cinéma américain, s’il y a quelque pertinence à produire ce genre de généralités, est celle que Henry James utilise pour différencier les romanciers français des romanciers anglo-saxons. Une « vaste expérience positive » caractérise les romanciers anglo-saxons, écrit James, alors que « les seules réactions émotives que les romanciers comme Flaubert et Maupassant sont capables de manifester à l’égard de la vie sont d’une espèce que l’on peut qualifier de négative et se réduisent pour l’essentiel à la pitié et à la haine »18.

Photogramme issu du long-métrage Le sens de la fête.

© Thibault Grabherr 2017 Quad+Ten / Ten Films / Gaumont / TF1 Films Production / Panache Productions / La Compagnie Cinématographique

Le naufragé est également français par filiation, par généalogie, par intertextualité. Beaucoup de critiques ont rapproché la persona filmique de Vincent Macaigne à celle de Gérard Depardieu, et j’ose la rapprocher de celle de Jean Gabin, car comme la figure du réalisme poétique, il représente le français moyen, mais surtout, il subit le même destin que le naufragé.

Même si, à l’occasion, le scénario lui assigne un autre emploi, l’identité sociale du Gabin d’avant-guerre est très lisible, c’est celle d’un ouvrier parisien resté proche de ses origines paysannes. Mais les grands personnages de Gabin ne subissent pas des destins collectifs, les épreuves auxquelles il est soumis ne sont pas celles du groupe (les Français, le prolétariat) dont il est supposé être le représentant. Ses drames sont individuels, et la plupart des scénarios des films qu’il interprète des récits d’exclusion des groupes dont il devrait faire partie, jusqu’à le marginaliser et le pousser au crime. […] Gabin interprète un perdant, le plus souvent voué à la mort. Étrange héros national en vérité. Mais héros tout de même, apprécié comme vaincu19.

Tous ces détours « identitaires » sont là pour montrer que même notre personnage a une identité, ce qui n’est pas pour autant une facilité quand il s’agit de l’exprimer et de la faire sienne. Il n’est pas nécessaire, tout le monde en conviendra, de faire appel à la sociologie ou aux sciences de la génétique pour montrer que chaque individu est porteur d’une identité, et que son identité est multipliée autant de fois qu’il entre en interaction avec la polis : un individu est un fils, un pair, un voisin, un collaborateur, un citoyen, il est autant de choses qu’il effectue d’actes. Or, nous vivons dans des temps où les individus ont de plus en plus de mal à s’approprier leur identité propre ; il est difficile d’exprimer son être car il est ardu de dire le soi20. L’acteur Vincent Macaigne est un exemple remarquable dans la mesure où, « emprisonné » dans le rôle du naufragé au cinéma (nous ne doutons pas que sa carrière évolue à l’avenir), il est tout à fait un autre artiste en dehors du grand écran, et devient metteur en scène de spectacles théâtraux à la pointe de la recherche scénique, et revêt à l’occasion la casquette de réalisateur de films : il a déjà produit son premier long-métrage (Pour le réconfort, 2017, avec Laurent Papo dans le rôle du naufragé, qui n’est jamais très loin), un court-métrage (Ce qu’il restera de nous, 2011) et un téléfilm (Dom Juan et Sganarelle, 2016).

L’injonction d’être sujet dans la société hypermoderne

J’émets l’hypothèse suivante : si le naufragé a tant de mal à exprimer sa voie, son claim aux hommes et femmes qui l’entourent, c’est du fait de la contemporaine et hypermoderne injonction d’être sujet. La littérature scientifique théorisant notre ère temporelle post-moderne et même surmoderne ou hypermoderne selon les auteurs, ne manque pas, et trône parmi les publications de ce type les plus abondantes sur les étals des bibliothèques spécialisées. Voyons plus précisément les différents points qui structurent mon axiome.

Nous avons vu que le naufragé ne se comprend probablement pas lui-même, et qu’il se trouve bien pénalisé quand il s’agit d’exprimer sa pensée, sa volonté, son idée ou quelques idées qui émanent de lui, et le principe de communication est intimement lié à la société humaine, dans le sens ou une parole est toujours destinée à quelqu’un, ce quelqu’un fut-il soi-même. Aussi, peut-être que la situation que vit le naufragé est une représentation artistique de la situation que vivent de nombreux contemporains. J’avance pour appui de ma théorie la note d’intention21 de Sébastien Betbeder et sa société de production lors de la recherche de financement pour le film 2 automnes 3 hivers, dans laquelle Sébastien Betbeder dit son désir d’évoquer et de sommariser en un film la vie des jeunes gens de sa génération. La « construction » individuelle de tout un chacun, du naufragé et de vous, son individuation, le processus de différentiation qui fait qu’un individu est « autre » que les membres de son espèce et le fait exister comme individu, est mal enclenché et mal conduit22, et c’est précisément ce que met en lumière le naufragé dans chacune de ses apparitions. Afin de comprendre les causes d’une représentation récurrente d’un tel personnage, il faut comprendre ce que Vincent de Gaujelac nomme l’injonction d’être sujet dans la société hypermoderne, ou l’idéologie de la réalisation de soi-même.

L’hypermodernité remet la question du sujet au centre. Elle suscite une série d’injonctions qui prennent le contre-pied de la position freudienne initiale : la société narcissique remet l’individu au centre du monde dans un sentiment de toute-puissance ; la quête de l’excellence et le culte de la performance l’entraînent dans une quête de réalisation de soi-même dans laquelle il entretient l’illusion d’être son propre créateur ; l’irrésistible ascension de la rationalité instrumentale pose le sujet en demiurge capable de performances illimitées dans le sens de la création comme dans celui de la destruction23.

Cette idéologie de la réalisation de soi-même, qui pousse et entraîne le plus grand nombre dans une course à l’individuation en rangs serrés ne fait qu’entraîner le monde, qui s’apparente de plus en plus à une masse au fur et à mesure que le processus avance, dans un couloir d’uniformisation, dont les murs directeurs doivent leur signature architecturale à la loi de la recherche du profit et qui a pour finalité l’uniformisation et l’indifférenciation des individus dans la société.

Or, peut-on encore s’individuer, trouver et affirmer sa différence vis-à-vis des autres dans un groupe uniforme ? C’est impossible : « L’avènement du sujet est un processus qui se développe dans une relation, une coconstruction du savoir, une reconnaissance mutuelle, une confrontation à l’altérité »24.

Cette opération est mathématiquement impossible : dans un groupe X, il n’y a pas de Y ; et, comme on le constate, le microcosme humain n’est pas réductible à une fonction algébrique, quand un Y apparaît dans un groupe X, il devient un bouc émissaire. Il me semble que le naufragé est en quelque sorte le bouc émissaire de l’hypermodernité, qui subit l’idéologie de la réalisation de soi-même. On observe qu’il est socialement mis à l’écart : dans tous les films il ne vit pas en ménage malgré son âge relativement avancé, dans Tonnerre (Guillaume Brac, 2013) il quitte Paris pour revenir chez son père dans l’Yonne afin de s’isoler, dans La loi de la jungle (Antonin Peretjatko, 2016) il est muté en Guyane pour mener une mission politiquement insignifiante, dans La bataille de Solférino (Justine Triet, 2013) il est empêché de rencontrer ses filles, il exerce des activités professionnelles peu rémunératrices en valeur monétaire, spirituelle et symbolique, par exemple dans Moonlight Lover et Des plans sur la comète (Guilhem Amesland, 2010, 2017) il est un maçon exerçant sans permis et s’adonnant à de petites magouilles et de menus passages de matériaux sous le manteau en esquivant grossièrement le passage à la caisse, dans La fille du 14 juillet (Antonin Peretjatko, 2013) il est le secrétaire d’un médecin qui exerce dans diplôme, et dans l’introduction de 2 automnes 3 hivers (Sébastien Betbeder, 2013), le naufragé déclare en début de film, et ici je cite le monologue introductif qui, dit par l’acteur Vincent Macaigne sous l’angle voulu par le réalisateur, fait école dans l’humour et le style tragi-comique :

L’homme a 33 ans, on dit encore jeune homme je crois, le jeune homme a 33 ans. Il vit à Paris, il est célibataire, ce qu’il fait dans la vie n’a pas d’importance, on donne toujours trop d’importance à l’activité professionnelle des gens ; c’est normal, ça représente l’essentiel de leur temps, de leur vie, c’est normal, mais parfois, ce n’est pas intéressant. Dans le cas d’Arman [ndlr : le naufragé], ce n’est pas intéressant. […] Moi aussi je cours. Le jour de mes 33 ans j’ai décidé de courir deux fois par semaine dans le parc d’en bas de chez moi ; le jour de mes 33 ans, ça a été le jour de LA révélation. Il faut que j’arrête de fumer, il faut que je me mette au sport, et il faut que je trouve un vrai métier parce que là, comme activité dans la vie, bah heu… j’enchaîne des petits boulots plus ou moins intéressants ; plutôt moins que plus pour être tout à fait exact. Et puis je démissionne, bon là euh… je suis dans une grosse période de démission. Donc j’ai 33 ans et il faut vraiment, vraiment que quelque chose se passe.

Très souvent, le naufragé fait preuve d’instabilité physique et surtout émotionnelle : dans Le sens de la fête il est un dépressif (qui ici aussi travaille sans être déclaré par son employeur) qui avale des antidépresseurs en quantité industrielle, dans Eden (Mia Hansen-Løve, 2014) et Une histoire américaine (Armel Hostiou, 2015), il se noie dans la drogue et dans l’alcool25 et il montre globalement tous les symptômes de l’individu victime de « la fatigue d’être soi »26, qui éprouve un trouble de la capacité à agir, une inhibition de l’action. Ehrenberg explique notamment que l’individu conquérant devient, en se prêtant au jeu qu’on lui propose, un fardeau pour lui-même. Tendu entre conquête et souffrance, l’individualisme qui le guide le pousse à entreprendre des techniques d’action sur soi au travers de drogues et de psychotropes. On peut penser à la « société de contrôle » dont parlaient Michel Foucaut et Gilles Deleuze notamment, qui, comme le nom l’indique, contrôle ses sujets par différents moyens autres que l’épée et la force physique répressive depuis que les chariots de l’inquisition ont arrêté de sillonner les villages de France et de Navarre. La dépression et l’addiction sont les noms donnés à l’immaîtrisable quand il ne s’agit plus de conquérir sa liberté, mais de devenir soi et de prendre l’initiative d’agir. La société qui voit le naufragé évoluer est qualifié par Gilles Lipovetsy de « société de la déception » : « La société hypermoderne est celle qui multiplie les occasions de l’expérience déceptive, en même temps qu’elle n’offre plus de dispositifs “institutionnalisés” pour y remédier27 ».

Le naufragé est un héros éminemment romantique, et le décalage qu’il expérimente avec son monde porte le spectateur du rire aux larmes, d’autant plus qu’il vit l’époque hypermoderne, caractérisée entre autres choses par un mouvement constant des éléments. Le naufragé montre le monde sous un angle réaliste, brut parfois, mais toujours juste, touchant et émouvant. Ce personnage qui, bien souvent, ne croit plus en son monde, à la capacité d’atteindre la sérénité dans son univers, poursuit bon gré mal gré sa destinée dans chaque film qu’il habite. Le cinéma contemporain, et plus précisément les films décrits ici, sont tous héritiers du cinéma moderne, avec lequel « la question n’est plus : « le cinéma nous donne-t-il l’illusion du monde ? » mais : « comment le cinéma nous redonne-t-il la croyance au monde ?28 ». Il est bien question de croire : le naufragé, dans les pics de malheur qu’il traverse, se confronte toujours à cette question. Il ne croit plus, ou pour être plus précis, il se demande s’il peut encore croire à une meilleure destinée. Et en ceci précisément, je trouve que ces films sont importants, car ils montrent ce malheur septique, la « catastrophe septique » que déplore Stanley Cavell et les résolutions possibles au doute destructeur. Lors d’une lecture de Martin Heidegger en 1961, on demanda à ce dernier comment pouvions-nous mieux orienter nos vies. Il répondit qu’il nous faudrait passer plus de temps dans les cimetières. Si le personnage que nous voyons à l’écran est poétiquement mort, alors le cinéma est son cimetière : ainsi, le naufragé et son spectateur devraient se rencontrer plus souvent dans ce lieu afin de mieux conduire leurs vies.

Par la représentation qui peut en être faite, le naufragé montre et questionne l’immersion de tout un chacun dans son environnement quotidien. Plongé dans un environnement similaire à celui de son spectateur, lui-même immergé dans le spectacle qu’on lui propose, le sujet est confronté aux volontés et désagréments, aux bonheurs et aux difficultés de l’alchimie délicate qui veut que l’individu s’individualise, tout en partageant son expérience avec ses prochains. Il montre ainsi les difficultés du mariage entre le contrat social et le contrat individuel.

Notes

1 Claude Hagège, Contre la pensée unique, Paris, Odile Jacob, 2012, p. 62 : « D’autres exemples encre seraient loser […]. Le premier s’applique à un individu qui échoue souvent dans ses entreprises, en perdant “to lose” car il a manqué un but qu’il s’était assigné. Ce mot est lourd d’implications sémantiques, engageant celui qui en est qualifié bien au-delà de la simple notion de perte. Car le suffixe -er réfère à une nature intime, et donc ce qui ne devrait concerner que le comportement en vient à concerner l’essence. Ainsi l’être se trouve caractérisé par le faire uniquement, c’est-à-dire dépossédé au profit du faire, comme si, au-delà des actions et de leurs résultats, il n’y avait rien qui pût être défini comme la personnalité profonde d’un individu. Une telle vision est étrangère à la conception européenne de la nature humaine héritée de la pensée grecque et de la philosophie judéo-chrétienne ». Return to text

2 Cette idée esthétique fut maintes fois travaillée au « premier degré ». On pense au tableau Le Radeau de la méduse de Théodore Géricault peint en 1819, ou aux romans et drames mettant en scène des naufragés. Return to text

3 Cahiers du Cinéma, « Jeunes cinéastes français, on n’est pas mort », n°688, avril 2013. Return to text

4 Plutôt que d’employer le mot « acteur », le philosophe Stanley Cavell préfère le « mot plus beau et plus juste de star, car les stars, les étoiles ne sont faites que pour être observées de loin, après coup, et leurs actions prédisent nos projets ». Stanley Cavell, La projection du monde, Paris, Belin, 1999, p. 58. Return to text

5 Stephen Mulhall, « Clint Eastwood dans la ligne de mire », dans Stanley Cavell. Cinéma et philosophie, Actes du colloque Stanley Cavell, Paris III, 5 et 6 mai 1999, Paris, Presses de la Sorbonne nouvelle, 2001, p. 206. Return to text

6 Laurent Jullier, Analyser un film. De l’émotion à l’interprétation, Paris, Flammarion, 2012, p. 299. Return to text

7 Martine De Gaudemar, La voix des personnages, Paris, Cerf, 2011, p. 81. Return to text

8 Ibid, p. 81. Return to text

9 Elise Domenach, « Stanley Cavell : les chemins de la reconnaissance », Revue Philosophique de Louvain, Volume 96, n°3, 1998, pp. 501-502. Return to text

10 Ludwig Wittgenstein, Tractatus logico-philosophicus, trad. Gilles Gaston Granger, Gallimard, 1993, p. 31. Return to text

11 Le chanteur Johnny Halliday avait déjà mis en chanson cette particularité de la vie en 1981 avec son album Pas facile. Return to text

12 Henri Laborit, Éloge de la fuite, Paris, Robert Laffont, 1976. Return to text

13 Ludwig Wittgenstein, Recherches philosophiques, Paris, Gallimard, 2014, p. 67. Return to text

14 Martine De Gaudemar, op. cit., p. 250. Return to text

15 Sandra Laugier, « Règles, formes de vie et relativisme chez Wittgenstein », Noesis, n°14, 2008, p. 26. Return to text

16 Peyre, Henri Zerner, « Le romantisme », Encyclopédie Universalis, consulté le 5 décembre 2017 Return to text

17 Sandra LAUGIER dir., Éthique, littérature, vie humaine, Paris, Presses Universitaires de France, 2006, p. 104. Comme le dit Jacques Bouveresse, qui rapporte l’analyse d’Henri James, ce dernier est « conscient du fait que le refus de toute espèce de consolation, qui caractérise les romans français, rend celui-ci probablement plus proche de la vie et, pour cette raison, plus vrai et plus profond. Mais on peut avoir le sentiment que cela le rend aussi, du même coup, plus indifférent au questionnement proprement éthique ». Return to text

18 Laurent Jullier, op. cit., p. 134-135. Return to text

19 Jean-Michel Frodon, La projection nationale, Paris, Odile Jacob, 1998, pp. 92-93. Return to text

20 Vincent Carraud, « Qui est le moi ? », Les Études philosophiques, n°88, 2009, p. 64 : « La nouveauté est ici l’indice de ce que le moi n’est comme tel identifiable à aucun des concepts avec lesquels il est ordinairement confondu : le sujet, l’esprit, l’âme, l’intellect, l’individu, la personne, etc. tous autrement plus anciens. » Return to text

21 Lire le dossier de presse du film, disponible sur le site de la société distributrice : https://www.ufo-distribution.com/movie/2-automnes-3-hivers/. Return to text

22 Voir René Girard et la théorie du désir mimétique pour comprendre les dangers de l’indifférenciation Return to text

23 Vincent De Gaujelac, « L’injonction d’être sujet dans la société hypermoderne : la psychanalyse et l’idéologie de la réalisation de soi-même », Revue française de psychanalyse, vol. 75, 2011, p. 1001. Return to text

24 Ibid, p. 1000. Return to text

25 L’usage d’alcool et de drogue, contexte récréatif compris, est considéré par Henri Laborit comme une fuite de l’individu face à un problème. Return to text

26 Alain Ehrenberg, La fatigue d’être soi. Dépression et société, Paris, Odile Jacob, 2000. Return to text

27 Gilles Lipovetsky, La société de la déception, Paris, Textuel, 2006, p. 28. Return to text

28 Gilles Deleuze, L’Image-temps. Cinéma 2, Paris, Minuit, 1985, p. 237. Return to text

References

Electronic reference

Arthur Clavié, « Communauté et immersion au prisme de l’intégration de l’individu : le personnage de Vincent Macaigne », RadaЯ [Online], 3 | 2018, Online since 01 janvier 2018, connection on 09 décembre 2024. URL : https://www.ouvroir.fr/radar/index.php?id=314

Author

Arthur Clavié

Arthur Clavié est un voyageur voguant sur son fleuve, passant de port en embarcations et de terres en continents. Mais la vie de bohème n’a qu’un temps (on souhaiterait qu’elle dure plus longtemps) et il a donc réalisé une licence en Études cinématographiques, puis le master Critique-Essais, écritures de l’art contemporain à l’université de Strasbourg. Ces années furent bien sympathiques, et fort formatrices dans l’élaboration de son œuvre.

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