Le Gabon face à la Covid-19 : mesures sanitaires et conséquences socio-économiques

DOI : 10.57086/rrs.140

p. 97-116

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Le monde s’effondre et la propagation mondiale de la Covid-19 met à genoux des États pourtant longtemps mus par l’idée qu’ils disposaient des meilleurs systèmes de santé au monde. Aujourd’hui, l’édifice sanitaire mondial vacille sous le poids de la pandémie. L’Afrique, après avoir hésité à prendre des mesures de prévention et de protection contre la Covid-19, la qualifiant parfois de « maladie des Blancs », est rattrapée par les évènements. Au Gabon, pour faire face à cette pandémie, les pouvoirs publics ont pris un certain nombre de mesures : fermeture des frontières terrestres, aériennes et maritimes, confinement partiel puis total de la population, déconfinement, mise en place des structures de gestion de la crise sanitaire, achat du matériel médical, etc. Ces mesures suffisent-elles à endiguer la pandémie de la Covid-19 ? Et quelles sont les conséquences socio-économiques de celle-ci ? Ce travail procède ainsi à un état des lieux de la gestion de la pandémie de la Covid-19 ainsi qu’à une première évaluation de ses conséquences socio-économiques.

L’Afrique, après avoir hésité à prendre des mesures de prévention et de protection contre la Covid-19, la qualifiant parfois de « maladie des Blancs »1, semble constituer l’un des nouveaux terrains d’expansion du virus. L’insuffisance récurrente des investissements de nombreux États africains dans le secteur médical renforce la précarité des systèmes sanitaires dépendant de l’aide des pays européens, asiatiques et nord-américains. Dominique Kerouedan estime ainsi que « pour éviter que la situation ne se détériore davantage, la France et l’Europe, qui ont une responsabilité historique à l’égard de cette région du monde, doivent veiller à ce que les ressources humaines et financières, allouées aux initiatives mondiales, aux dépens de l’aide bilatérale, bénéficient aussi aux personnes les plus démunies d’Afrique francophone »2. Seulement, les États habituellement pourvoyeurs d’aides sont eux-mêmes exsangues face à la pandémie et se replient sur eux-mêmes. Cette situation contraint à une prise de responsabilité des États africains, autant pour imposer et faire respecter la discipline nécessaire à la mise sous contrôle de ce nouveau phénomène sanitaire que pour pourvoir aux matériels médicaux essentiels à la prévention comme à la gestion des cas de personnes infectées.

Le premier cas de Covid-19 confirmé en Afrique a été signalé en Égypte le 15 février 20203. Au Burkina Faso et au Gabon, les premiers cas ont été confirmés respectivement le 9 et le 12 mars 2020. Depuis lors, la pandémie a évolué sur le continent au point qu’au 17 juillet 2020 le continent a enregistré 663 953 cas confirmés, 343 418 cas soignés et 14 359 décès4. Toutefois, ces cas diagnostiqués ne sont pas uniformément répartis sur le continent5. Avec 59 671 prélèvements, 6 433 cas confirmés, 4 033 guérisons et 46 décès6 au 21 juillet 2020, le Gabon n’est pas épargné par la pandémie. Pour une population générale estimée à 1,8 million d’habitants d’après le recensement général de la population et des logements en 2013, ces chiffres peuvent être jugés peu alarmants, mais s’expliquent par l’absence de tout dépistage massif. Pour l’heure, les tests sont réservés aux cas suspects ou aux personnes devant voyager. Or, selon le Centre de contrôle et de prévention des maladies de l’Union africaine, le manque de tests dans certains pays brouille les chiffres réels du coronavirus en Afrique7. L’analyse des données des centres africains de contrôle et de prévention des maladies confirme que plus on teste, plus on compte de cas bien évidemment, et que l’incidence cumulée des cas notifiés de Covid-19 est directement proportionnelle au pourcentage de la population testée8.

Malgré des différences de chiffres, les pays africains ont adopté des stratégies de riposte similaires, en sept étapes9 : la première s’est concentrée sur la préparation au niveau institutionnel, administratif, sanitaire ; la deuxième étape concernait la déclaration de l’état d’urgence par les gouvernements face à la recrudescence de cas de Covid-19 ; la troisième étape a consisté en un verrouillage systématique des frontières nationales (aériennes, terrestres, maritimes : Bénin, Congo) ; à la quatrième étape, certains gouvernements tirant les leçons de la pandémie d’Ebola (Ghana, Libéria, Afrique du Sud, Kenya, Zimbabwe) ont mobilisé les agents de santé communautaire dans les communautés les plus exposées pour entreprendre un dépistage actif ; la cinquième étape comprend l’identification des points chauds et la mise en œuvre de mesures de prévention dans les zones où les foyers épidémiques sont identifiés ; la sixième étape s’est concentrée sur la fourniture de soins médicaux, outils et équipements aux populations, et pour certains pays comme l’Afrique du Sud et le Nigéria, à la construction d’hôpitaux de campagne ; la septième étape consiste en la gestion des décès et enterrements et des problèmes de santé mentale associés au deuil. Parallèlement, certains gouvernements se sont engagés à rester vigilants en participant à des activités de recherche de cas et en surveillant les niveaux d’immunité de la population à l’aide de séro-diagnostics, anticipant ainsi de potentielles vagues épidémiques ultérieures.

Au Gabon, les déficits de la couverture médicale liés à l’aménagement du territoire, à l’organisation de la carte sanitaire et à la répartition du personnel de santé complexifient la réponse apportée par le gouvernement gabonais. Mais, au regard des chiffres, c’est moins l’épidémie, assez peu meurtrière au Gabon pour l’instant, que les mesures prises pour l’endiguer qui vont avoir les répercussions les plus visibles et importantes, notamment sur l’économie gabonaise, faiblement diversifiée et dépendante en grande partie des ressources extractives.

Le système de santé du Gabon avant la pandémie

Un système de santé tributaire des acquis coloniaux

Jusqu’en 1960 et la proclamation de l’indépendance du Gabon, l’État français colonial était le principal employeur des cadres médicaux et des structures de soins. La médecine était essentiellement l’affaire des militaires : des médecins militaires ont été de toutes les missions d’exploration, de toutes les campagnes de conquête et de pacification outre-mer. Même si leurs noms sont souvent restés dans l’ombre, éclipsés par les faits glorieux des Brazza, Archinard, Lamy, Lenfant, Marchand, Galliéni, ces médecins et pharmaciens ont pourtant tracé la voie de l’œuvre sanitaire de la France coloniale, accompagnant et soutenant le soldat en opération10. Ainsi, l’hôpital de Brazza est construit autour des années 1890 à Libreville, avant que ne viennent s’y rajouter les centres de santé de London (1927), de Lalala (1951) et le laboratoire de Nkembo (1949), dont l’objectif était le dépistage et la surveillance épidémiologique de la trypanosomiase. À l’intérieur du pays, l’hôpital Albert-Schweitzer à Lambaréné est créé en 191311. Outre les militaires, les missions protestantes participent à la mise en œuvre d’un réseau de santé au Gabon avec l’appui des infirmières et du personnel militaire, avec la création à l’intérieur du pays des dispensaires à N’gomo (1898), Samkita (1898), Talagoua (1882), Ovan (1939). Toutes ces structures de soins devaient prendre en charge les épidémies et les maladies endémiques. Les soins dispensés à la population étaient gratuits.

Depuis l’indépendance du pays, les nouveaux pouvoirs publics gabonais ont mené, entre autres, des réorganisations successives du ministère de la Santé publique, dont la plus récente a désormais vingt-cinq ans. Selon le décret 488/PR/MSPP du 30 mai 1995, le système de santé gabonais compte 10 régions et 50 départements sanitaires. Il repose sur trois secteurs de santé (public civil et militaire ; parapublic ; privé lucratif et non lucratif), cohabitant avec la médecine traditionnelle sans relation formelle de complémentarité. Ainsi, l’État gabonais poursuit l’œuvre coloniale en matière de Santé publique en optant également pour la gratuité des soins en plus de la construction des structures de santé. La crise économique des années 1980 met cependant fin à la gratuité des soins. Depuis treize ans, le Gabon dispose de la Caisse Nationale d’assurance maladie (CNAMGS), mise en place par l’ordonnance n° 0022/PR/2007 du 21 août 2007. Elle assure la maladie et la maternité. Ses objectifs sont l’amélioration de l’accès aux soins de santé, la contribution à l’amélioration de l’offre de soins, la lutte contre l’exclusion et la pauvreté12. Les Gabonais économiquement faibles perçoivent des allocations familiales, une prime de rentrée scolaire et une prime à la naissance sous forme de layette. Ils sont également pris en charge dans le cadre des évacuations sanitaires sans aucune contribution financière de leur part. L’assurance maladie de la CNAMGS étant obligatoire et universelle, toute la population gabonaise doit à terme être immatriculée : selon le directeur général adjoint de la Caisse d’Assurance Maladie et de Garantie Sociale en date du 22 mai 2019, c’est déjà le cas pour 900 000 à 1,3 million de citoyens13.

En matière de construction des infrastructures sanitaires, les efforts des pouvoirs publics de l’État gabonais sont particulièrement visibles sur la dernière carte sanitaire du Gabon (2017)14, de l’annuaire statistique 201715 et du tableau de bord 201716. Le secteur public civil dispose de 4 centres hospitaliers universitaires de construction récente à Libreville, 9 centres hospitaliers régionaux, 2 hôpitaux spécialisés, 4 hôpitaux, 10 bases épidémiologiques, 43 centres médicaux, 18 centres de santé urbains, 16 centres de santé ruraux, 1 centre de santé communautaire, 444 dispensaires, 21 cases de santé, 1 institut d’épidémiologie, etc. Par ailleurs, le secteur public militaire possède également 1 hôpital, 4 infirmeries hôpitaux, 5 centres de santé maternelle, 3 infirmeries de garnison et 11 infirmeries d’unité. Le secteur privé lucratif et non lucratif a 3 hôpitaux, 142 cabinets médicaux, 14 polycliniques, 76 cliniques, 93 dépôts pharmaceutiques, 43 pharmacies, 6 laboratoires, 30 infirmeries, 11 dispensaires, 1 case de santé, 8 centres médicaux. Le secteur parapublic dispose de 6 centres médico-social et 1 polyclinique. En matière de formation du personnel de santé enfin, le personnel médical est formé essentiellement en France, à Dakar au Sénégal, et à Libreville depuis la création de la faculté de médecine en 1972. Quant au personnel infirmier, une école d’infirmiers a été fondée à Libreville en 1958.

Problèmes des services de santé au Gabon avant l’apparition de la Covid-19

Selon le rapport IMEDA (2004), le profil épidémiologique observé au Gabon est classique pour une région équatoriale, caractérisée par une morbidité qui se présente en trois groupes. Le premier groupe inclut les maladies entraînant une forte demande en services curatifs comme le paludisme, les infections respiratoires aiguës, les maladies diarrhéiques, les parasitoses intestinales et urinaires. Le second groupe est composé de maladies évitables par la vaccination et visées par le Programme Élargi de Vaccination (tétanos néo-natal, rougeole, coqueluche, diphtérie, poliomyélite, fièvre jaune). Le troisième groupe quant à lui est formé de maladies émergentes ou réémergentes comme l’onchocercose, la lèpre, la tuberculose, la trypanosomiase, les infections sexuellement transmissibles, l’hypertension artérielle, le diabète, la fièvre hémorragique à virus Ebola (FEB).

S’agissant de la FEB, le Gabon a connu quatre épidémies. Le ministère de la Santé en 2008 avait relevé la faible capacité des systèmes de santé dans le bassin du Congo à faire face à cette maladie et bien d’autres maladies virales17. De ce fait, lors des différentes épidémies d’Ebola, le Gabon a bénéficié de la part de l’Organisation mondiale de la santé et la Banque africaine de développement, des aides pour la formation des personnels de santé et des relais communautaires ainsi que pour la mise en place des réseaux de veille et de surveillance de la FEB. Les pouvoirs publics gabonais peuvent ainsi se servir, en vue d’une meilleure prise en charge de la Covid-19, de l’expérience acquise dans la gestion d’épidémies antérieures, et en particulier de la FEB avec la mobilisation de soignants formés, la réactivation d’infrastructures existantes, de centres de traitement ou de détection.

L’analyse de l’annuaire statistique (2017)18, de la carte sanitaire (2017)19 et du tableau de bord20 (2017) révèle cependant que le système de santé gabonais souffre dans l’ensemble d’une répartition très inégale des ressources humaines et matérielles, des infrastructures et des ressources financières entre les régions et les départements sanitaires. Il s’en dégage les constats suivants :

  • L’offre de soins de qualité présente des insuffisances aux différents niveaux de la pyramide sanitaire. L’essentiel des ressources se trouvent au niveau central qui abrite certes plus de la moitié de la population. Libreville accueille ainsi les 4 CHU, les 3 voitures médicalisées dont dispose le pays, et 152 (55 %) des 277 médecins généralistes du Gabon. Enfin, sur 35 anesthésistes réanimateurs au Gabon, 29 (82 %) sont dans la capitale.

  • L’absence d’un cadre formel de concertation entre les différents secteurs de santé limite la collaboration intersectorielle et rend difficile la rationalisation de l’offre de soins.

  • L’insuffisance des ressources budgétaires empêche la maintenance des équipements biomédicaux.

  • Le manque d’eau courante dans certaines formations sanitaires, y compris au niveau des structures de référence nationales (CHU), nuit à l’hygiène hospitalière.

  • Les insuffisances et dysfonctionnements du système national d’information sanitaire ne permettent pas encore de disposer en temps opportun des données rendant dynamique la gestion de l’information sanitaire. Pour mieux gérer les données socio-sanitaires, il pourrait être pertinent de mettre en place un mécanisme de gestion et de suivi sous la forme d’un observatoire de la santé pour produire des informations intelligibles et utilisables pour le suivi et l’évaluation de l’état de santé de la population21.

Par ailleurs, l’examen du classement du rapport 2018 de l’Organisation des Nations Unies sur le développement de l’e-gouvernement22 fait ressortir que le Gabon est un pays intermédiaire. En juillet 2020, le Gabon occupe la 113e place mondiale sur 193 pays sondés au classement de développement de l’e-gouvernement (EGDI), soit 12 places gagnées comparativement à son rang en 2018. Cette performance classe ainsi le pays à la tête de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) et au 10e rang continental dans le secteur de la gestion numérique. Le Gabon se classe ainsi au-dessus de la moyenne africaine (0,34) et rentre dans la même catégorie que des pays comme le Honduras et le Nicaragua en Amérique latine, le Bangladesh en Asie et le Rwanda, l’Algérie et le Maroc en Afrique. Cependant, le Gabon a un indice de services en ligne à la traîne (OSI de 0,23) avec pourtant une infrastructure de télécommunication de bonne qualité (TII de 0,425) et marquée par une forte pénétration de la téléphonie mobile23. Néanmoins, dans un contexte pandémique, le numérique voit son importance s’accroître. Une cartographie des zones à risque ainsi qu’une plate-forme numérique pour le suivi des malades viennent d’être développées par une équipe de chercheurs gabonais dirigée par un enseignant-chercheur de l’École Nationale des Eaux et Forêts du Gabon avec l’appui financier de l’Agence universitaire pour la Francophonie (AUF). Cette plate-forme complète le suivi de la pandémie effectué par l’Agence Gabonaise des Études et d’Observations Spatiales (AGEOS), partenaire technique du Comité de pilotage du plan de veille et de riposte (COPIL) dont les données sont présentées dans le paragraphe suivant.

Situation épidémiologique au Gabon

La situation épidémiologique de la Covid-19 au Gabon durant la période du 12 mars (cas 0 identifié au Gabon) au 21 juillet 2020 se présente de la manière suivante :

Prélèvements : 59671 ; Total cas confirmés : 6433 ; Total guérisons : 4034 ; Décès : 46.

Le nombre de prélèvements est en augmentation depuis l’apparition de la Covid-19 au Gabon. Cependant, le nombre de décès demeure insignifiant en comparaison d’autres pays (États-Unis, Brésil, etc.). Il évolue très lentement et reste très proche de 50 décès se confondant ainsi à l’axe des abscisses.

Fig. 1. Évolution épidémiologique au 21 juillet 202024

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La province de l’Estuaire est la plus représentée en nombre de cas (4 889 cas soit 76 %) pour une densité de la population de 43 hab/km2 suivie des provinces du Haut-Ogooué (900 cas soit 14 %, 8 hab/km²), du Moyen-Ogooué (200 cas soit 3,3 %, 6 hab/km2), Woleu-Ntem (100 cas soit 2,1 %, 6 hab/km2), l’Ogooué Maritime (50 cas, soit 1 %, 8 hab/km2). On observe également que les provinces de la Nyanga, la Ngounié, l’Ogooué Lolo, l’Ogooué Ivindo ont peu de cas (autour de 20 cas) en même temps qu’elles ont de faibles densités de population (entre 1 à 3 hab/km2).

Fig. 2. Évolution des cas au 21 juillet 2020 par province et densité de la population25

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L’apparition du virus dans d’autres localités que Libreville où a été identifié le premier cas (12 mars 2020) fait douter de l’efficacité des différents confinements (partiel, total, déconfinement). La circulation des personnes contaminées serait à l’origine de la diffusion de la maladie dans ces localités, malgré les différentes précautions prises par les pouvoirs publics. D’après le coordinateur du Comité National de Riposte contre la Covid-19, « l’unique explication plausible reste liée au confinement défectueux du Grand Libreville. Le principe présenté par le gouvernement, pour sa mise en pratique le 12 avril passé, était ni entrée, ni sortie. Mais, pendant cette période, la circulation des personnes n’a pas cessé au point d’autoriser le transfert du corps d’un homme politique de Libreville à Franceville. Il est loisible d’imaginer l’attitude des personnes plus préoccupées par les rites funéraires que le respect des mesures barrières »26. Dans tous les cas, les pouvoirs publics gabonais semblent avoir opté pour des mesures drastiques, même si le nombre de malades et de décès dus au coronavirus ne plaide pas en faveur de ces mesures. Les images et chiffres diffusés par les médias européens ont transmis en grande partie la peur du coronavirus aux populations et pouvoirs publics en Afrique subsaharienne et au Gabon en particulier, au point d’opter pour des mesures drastiques de confinement. De plus, l’Organisation mondiale de la santé par la voie de son directeur général avait fait part de ses craintes d’une hécatombe en Afrique subsaharienne dès l’apparition de la Covid-19 en déclarant : « notre plus grande préoccupation reste le potentiel de propagation de la Covid-19 dans les pays où les systèmes de santé sont plus faibles » lors d’une réunion ministérielle d’urgence organisée par l’Union africaine et les Centres pour la prévention et le contrôle des maladies en Afrique27.

Mesures gouvernementales contre la Covid-19

Les organes de gestion de la Covid-19 au Gabon

Les pouvoirs publics ont mis en place des organes dédiés spécifiquement à la gestion de cette nouvelle épidémie :

  • le comité de pilotage du plan de veille et de riposte (COPIL) est constitué des différents membres du gouvernement et dirigé par le Premier ministre. On y retrouve les ministres des Affaires étrangères, de l’Intérieur, de la Santé ainsi que les responsables des Comités Technique et Scientifique. Le comité est chargé de la coordination de l’action gouvernementale en matière de lutte contre la Covid-19.

  • le Comité National de Coordination Technique de la Riposte est composé des personnalités scientifiques relevant du ministère de la Santé dans les secteurs public, civil et militaire. Ce comité traduit dans les faits les directives du gouvernement gabonais en matière de lutte contre la pandémie.

  • le Comité scientifique de riposte est institué aussi sous l’autorité du Premier ministre. Il a pour mission de faire toutes diligences intellectuelles, doctrinales, scientifiques et techniques relatives à l’épidémie, de faire toutes recherches, études, investigations et de collecter toutes données scientifiques en rapport avec la Covid-19, d’établir toute collaboration scientifique et technique avec tout spécialiste et tout expert, national ou international, en vue de recueillir et de mettre en œuvre les meilleurs standards scientifiques en vigueur en la matière, de conseiller le gouvernement sur les dispositifs, processus, protocoles et solutions les plus pertinents pour réponse optimale à l’épidémie de coronavirus, d’assurer le suivi de l’évaluation des mesures mises en œuvre, de procéder à l’adaptation de la stratégie nationale de riposte à l’épidémie, de prendre toute initiative scientifique et technique s’inscrivant dans le cadre de la mise en œuvre de sa mission. Le comité est composé de chercheurs, d’experts et de médecins.

Enfin, le Sénat a mis en place une cellule de veille et de riposte ad hoc. Elle a l’ambition de se constituer en véritable relais du gouvernement dans le cadre de la sensibilisation contre la propagation de la Covid-19. Son rôle consiste également à évaluer l’action gouvernementale en matière de lutte contre cette pandémie et de relayer les décisions gouvernementales auprès des collectivités locales dont ils sont les représentants.

De manière générale, la classe politique n’est pas muette face à la diffusion de la pandémie au Gabon. De plus en plus de voix s’élèvent parmi les acteurs politiques pour inviter les populations à respecter les mesures barrières et faire montre de responsabilité et de discipline. De même, les leaders religieux de toutes obédiences participent à la prévention en sensibilisant leurs fidèles. Ainsi, des messages de prévention sont diffusés dans les groupes sociaux et à la télévision invitant les fidèles à respecter les mesures barrières préconisées par la communauté scientifique et relayées par les pouvoirs publics.

Si les différents organes sus-cités ont pour vocation de lutter contre la Covid-19, il reste néanmoins que leur collaboration au quotidien n’est pas optimale. De plus en plus de voix s’élèvent contre le COPIL sur sa manière de gérer la pandémie, lui reprochant le manque de communication entre les trois organes techniques. D’après un médecin de Santé publique, membre du comité scientifique, « les décisions se prennent à la Présidence de la République sans parfois nous associer. Les pouvoirs publics ont confié la gestion de la pandémie du Covid-19 au service de santé militaire qui a toutes les prérogatives ». De plus, certains responsables religieux voient d’un mauvais œil la non-ouverture des lieux de culte au même titre que les restaurants et les hôtels dans les mesures prises lors du déconfinement partiel de la population.

Mesures gouvernementales et apports des partenaires du développement

Les actions des pouvoirs publics contre la pandémie de Covid-19 ont débuté avant même que le pays n’ait enregistré officiellement son premier cas de contamination. Deux conseils présidentiels ont permis de mettre en place un dispositif spécifique dans les structures sanitaires et aux frontières aériennes, terrestres et maritimes. Dès l’annonce du premier cas le 12 mars 2020, le conseil des ministres décide des mesures suivantes :

  • autorisation d’un seul vol international par semaine et par compagnie aérienne exerçant ou desservant le territoire gabonais ;

  • fermeture des restaurants à l’exception des services à emporter et de livraisons ;

  • fermeture de tous les lieux de culte et recommandation de prières à domicile ;

  • interdiction des rassemblements de personnes ramenées de 50 à 30 personnes ;

  • suspension des audiences dans les tribunaux et cours de justice à l’exception des contentieux essentiels ;

  • interdiction des visites dans les prisons ;

  • interdiction des visites dans les hôpitaux sauf autorisation expresse du corps médical.

Le Président de la République gabonaise renforce encore ces mesures dès l’annonce du premier décès attribué au SARS-CoV-2 le 20 mars 2020. Dans une annonce à la nation, il décide d’un confinement partiel du pays entre 19h30 et 6h, l’interdiction des rassemblements de plus de 10 personnes, ainsi que la fermeture des frontières aériennes, terrestres et maritimes. En plus de ces mesures, le gouvernement interdit l’ouverture des bars, des boîtes de nuits, des hôtels, motels et autres lieux de plaisance. Certains hôtels, dont le Ré-Ndéma au quartier Glass, Héliconies à Akanda et le camp turc au quartier Agondje sont réquisitionnés pour la mise en quarantaine des personnes venant des pays à risque ou ayant été en contact avec des contaminés. En outre, les campagnes de sensibilisation sur les gestes barrières s’intensifient. Les effectifs des travailleurs dans les administrations ont été réduits par la mise en place de congé technique pour certains employés, tandis que d’autres travaillent en turn-over. D’autres mesures sont ensuite prises, notamment le dépistage de la population, le confinement total de l’agglomération de Libreville ou encore une importante aide sociale (paiement des factures d’électricité et d’eau au profit des plus faibles, gratuité des transports publics, suspension de la perception des loyers par les bailleurs au profit des plus fragiles, fonds d’aide de 2,5 milliards de francs pour les petits propriétaires concernés, accompagnement des entreprises et des commerçants par la réduction de certaines taxes, remise d’impôts et création d’un fonds d’aide pour les petites et moyennes entreprises (PME), 225 milliards de francs CFA pour les besoins urgents de trésorerie des entreprises28).

 

Parallèlement, le président de la République gabonaise a réceptionné à l’aéroport international Léon Mba, le 27 mars 2020, le matériel médical composé de 1 500 000 masques, 200 000 tests, 2 000 thermoflash. Dans le même temps, la Fondation Jack Ma et l’entreprise chinoise Ali baba ont fait un don de matériel composé de 20 000 tests, 100 000 masques et 1 000 équipements de protection individuelle. De plus, 20 000 flacons de gels seront produits chaque jour par l’usine de Nkok29. Les partenaires au développement30 ont également apporté leur appui à la lutte contre la Covid-19. L’Organisation mondiale de la santé a effectué un premier appui logistique au Gabon par la mise à disposition de 1 000 kits de dépistage, 1 500 kits d’équipement individuel, 250 kits d’extraction virale, 2 véhicules pour le transport d’échantillons, tandis qu’une application de collecte et de gestion des cas et des cas contacts de la maladie à virus Ebola est expérimentée pour la première fois au Gabon dans le cadre de la riposte contre la Covid-19. Le 22 avril 2020, l’OMS a également doté le Comité de Pilotage du plan de veille et de riposte de 40 000 masques chirurgicaux, 900 masques de protection, 500 masques FFP2, 10 000 gants, 200 lunettes et 1 200 combinaisons. Le programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a mobilisé 350 000 dollars soit environ 210 millions de francs CFA en collaboration avec l’OMS pour l’achat de 5 000 kits de dépistage et 16 ventilateurs. Le Fonds des Nations Unies pour la Population (FNUAP) a également mis à la disposition des maternités des dispositifs d’hygiène (eau, savon, solution hydro-alcoolique) en plus des gants, bavettes, masques, lunettes, protection individuelle. L’organisation des Nations Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture (UNESCO) enfin assiste le gouvernement dans la mise en place d’une stratégie de déploiement progressif de l’éducation à distance pour les différents niveaux d’enseignement. L’une des priorités consiste à permettre la tenue du baccalauréat. À cet effet, une plateforme de cours en ligne a été développée dans le cadre du programme « Train My Generation : Gabon 5 000 ».

Dans la prise en charge des malades, les pouvoirs publics ont mobilisé quelques services du centre hospitalier universitaire de Libreville, de l’hôpital d’Instruction des Armées Omar Bongo Ondimba. Ces structures accueillent les malades atteints de la Covid-19 et ceux atteints d’autres pathologies sont confiés aux autres services. Dans les provinces, chaque centre hospitalier régional a été consigné avec quelques lits d’hospitalisation réservés pour la prise en charge des malades de la Covid-19.

Fig. 3. Localisation des structures de soins prenant en charge les malades de la Covid-19 au Gabon

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Les différentes mesures prises par les pouvoirs publics gabonais en vue d’endiguer la pandémie ne sont pas singulières au pays, et les États de la sous-région ont presque adopté les mêmes stratégies. Celles-ci ne sont cependant pas adaptées à la situation socio-économique des populations africaines, vivant majoritairement de l’économie informelle. Par ailleurs, au Gabon, comme dans les autres pays africains voisins, ces mesures n’ont pas été appliquées rigoureusement. Devant les difficultés sociales engendrées par le confinement total de la population, les pouvoirs publics ont décidé le déconfinement de la population le 28 avril 2020. Celui-ci est suivi par l’organisation d’un dépistage massif de la population et la prise en charge des cas détectés. En matière de dépistage par PCR, le Gabon a acquis un giga laboratoire à Libreville dont la capacité serait de 5 000 à 10 000 tests par jour. Il vient s’ajouter au Centre International de Recherche Médicale de Franceville (1 600 tests par jour), au Centre de Recherche Médicale de Lambaréné (100 tests par jour), et au Laboratoire National de Santé Publique à Libreville (500 tests/jour). Malheureusement, cette capacité d’analyse des tests n’est pas répandue sur l’ensemble du pays et les prélèvements réalisés dans les provinces ne sont analysés uniquement que dans trois localités.

Conséquences sanitaires de la covid-19 au Gabon

L’apparition soudaine de la Covid-19 a ébranlé le système de santé gabonais. Les difficultés observées avant la Covid-19 se sont renforcées. Les maigres ressources disponibles pour la prise en charge d’autres pathologies ont été détournées pour lutter contre la pandémie. Lors de la journée internationale de lutte contre le paludisme célébrée chaque 25 avril, le directeur national de lutte contre le paludisme31 au Gabon constate que la nouvelle maladie a monopolisé toutes les ressources du système sanitaire : « La Covid-19 vient compliquer les choses : saturation du système de santé, détournement des infrastructures de santé et du personnel alors que le paludisme est toujours là ». Rappelons qu’au Gabon, le paludisme est la première cause de mortalité, d’hospitalisation et d’absentéisme à l’école ou au travail et 15 % des enfants de moins de 5 ans meurent de paludisme chaque année. Selon la même source, dans les rues comme dans les marchés, les populations ne cachent plus leur peur d’aller à l’hôpital en cas de fièvre ou de toux : « quand tu te présentes à l’hôpital, ils vont te dire que tu as la corona, alors que tu ne l’as pas. Voilà pourquoi nous fuyons les hôpitaux »32, explique une jeune femme. Malheureusement, aucune étude analysant les répercussions de la crise épidémique due au SARS-CoV-2 sur la prise en charge d’autres pathologies dans les hôpitaux n’est encore disponible au Gabon.

Conséquences socio-économiques de la Covid-19 au Gabon

Conséquences socio-économiques

Les différentes mesures prises par le gouvernement en matière de lutte contre la Covid-19, notamment le confinement partiel et total, ont surtout eu des conséquences socio-économiques. Avec la fermeture des frontières, le Gabon connaît une pénurie alimentaire étant donné qu’il tire l’essentiel de ces ressources alimentaires des pays voisins, particulièrement le Cameroun. Malgré des facteurs naturels favorables au développement de son agriculture (climat équatorial, terres agricoles fertiles avec plus de 2 000 km2 de terres cultivables), le Gabon fait face à des carences alimentaires accrues qui suscitent le recours à de nombreux partenaires économiques. Les produits alimentaires importés en provenance du Cameroun33 sont essentiellement les produits vivriers (bananes plantains, tubercules de manioc, taros, ignames, piments, etc.), les produits maraîchers (tomates, choux, haricots, oignons, fruits, etc.), les produits alimentaires industriels (eaux minérales, produits Nestlé, produits chococam, boissons de brasseries, etc.), et enfin les produits d’élevage (bovins, caprins). On comprend bien que la fermeture des frontières avec le Cameroun ait provoqué une pénurie de produits alimentaires au Gabon et particulièrement à Libreville.

Depuis le début de la crise sanitaire, les marchés de Libreville font face à une pénurie de manioc, l’aliment de base de la population gabonaise34. En conséquence, les coûts ont augmenté : le bâton de manioc est passé par exemple de 300 FCFA à 400 FCFA dans les marchés de Libreville. En effet, malgré la défiscalisation de certains produits par les pouvoirs publics, certains commerçants mettent à profit cette crise sanitaire pour augmenter les prix de certains produits de consommation courante. D’autres vendent des produits avariés comme le rapporte le journal l’Union35 qui indique que les vétérinaires-inspecteurs et ingénieurs agro-alimentaires de l’Agence gabonaise de sécurité alimentaire (Agasa) ont procédé au retrait de quelques produits avariés au marché Banane du PK-8 dans la périphérie sud de Libreville.

S’agissant du transport intra-urbain, malgré le déconfinement en vigueur, les mesures gouvernementales ont exigé la réduction du nombre de passagers dans les transports en commun. Un bus qui transportait auparavant 18 passagers a été sommé par les pouvoirs publics de ne transporter que la moitié, tandis qu’un taxi avec une capacité de 3 voyageurs était limité à 2 passagers, provoquant une moindre accessibilité aux transports en commun de la part des populations périphériques et urbaines.

En matière d’éducation, les élèves et étudiants ne vont plus à l’école. Cette situation a amené certaines écoles privées à utiliser les nouvelles technologies. Les cours, exercices et devoirs sont transmis aux élèves par internet. Le secteur public, notamment dans l’enseignement secondaire, a opté pour des cours à la radio et à la télévision. Depuis le mois d’avril, le Ministère de l’enseignement secondaire avec le concours de l’UNESCO a lancé le projet de l’enseignement à distance. Sur la plateforme xgestedu.com, ce sont près de 1 800 personnes qui consultent quotidiennement les contenus mis en ligne par le ministère de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur sous la supervision de l’Institut pédagogique national36. Sans vouloir minimiser l’apport d’un tel projet, on pourrait s’interroger sur son efficacité au niveau des élèves au regard des grands défis à relever par les pouvoirs publics dans le numérique, notamment la disponibilité et le développement d’une infrastructure adéquate, la qualité de formation aux TIC, la convivialité et la facilité d’apprentissage et d’accès des personnes vulnérables. Pour l’heure, tous les élèves gabonais n’ont pas accès à Internet. Dans les universités, grandes écoles et instituts, les cours n’ont toujours pas repris alors que les pouvoirs publics semblent opter pour des cours en ligne. Malheureusement, les structures administratives universitaires sont mal préparées aux nouvelles technologies. L’accès à Internet à domicile est presque impossible pour la grande majorité des étudiants, voire des parents d’élèves et des enseignants. Dans ce contexte, le projet d’organiser les cours en ligne dans les universités et grandes écoles est une gageure.

Conséquences économiques

D’après le programme des réformes économiques et financières de la Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC), dont les membres sont confrontés à des défis de sécurité, de rétablissement des équilibres macro-économiques et de diversification économique, les conséquences de la crise épidémique seront importantes, immédiates et multiformes pour les États mais d’ampleur différente selon les pays, eu égard à leur caractère de pays pétrolier ou non et au degré de diversification de leur base productive. Selon la même source, les conséquences économiques et financières seront de plusieurs ordres, dont une baisse significative des recettes budgétaires, une dégradation importante des comptes macro-économiques, une baisse des financements extérieurs, une perturbation des échanges intracommunautaires, une fragilisation de la stabilité externe et financière et un risque de montée des tensions inflationnistes. Dans le même ordre d’idée, la Conférence des Nations unies pour le Commerce et le développement (CNUCED) a estimé récemment que la croissance due au Produit intérieur brut de l’Afrique pourrait connaître une chute considérable, passant de 3,2 % à 1,8 % en 2020. L’économie de l’Afrique comme des autres continents serait ainsi durablement touchée en matière d’investissements.

L’économie gabonaise, fondée sur le pétrole, devrait connaître des perturbations consécutives à la baisse du prix du baril. Selon les prévisions de la CNUCED, les pays exportateurs de pétrole risquent d’être les plus durement affectés, le cours de l’or noir étant en chute libre. Le gouvernement gabonais ayant élaboré ses prévisions budgétaires sur la base de 50,57 USD le baril, alors qu’il est de 42,66 USD en juillet 2020, il est évident que le Trésor public rencontre aujourd’hui d’énormes difficultés à tenir ses engagements. Face à la récession économique qui s’annonce, le gouvernement gabonais prévoit un plan de relance économique. Alors que le pays devait renouer avec un taux de croissance de l’ordre de 3,8 % en 2020, les estimations actuelles tablent sur un chiffre en dessous de 0 : un scénario catastrophe qui oblige les pouvoirs publics à adopter un plan d’urgence afin d’éviter le pire. Pour cela, le gouvernement peut déjà compter sur l’appui du Fonds monétaire International.

Outre le pétrole, l’économie gabonaise repose sur son secteur informel constitué de petits commerces comme les débits de boissons, les restaurants, les lieux de loisirs et les comptoirs de commerce. Selon un classement publié par le Fonds monétaire international (FMI) en juillet 2017, le Gabon est le pays d’Afrique centrale où le secteur informel est le plus important. Il représenterait entre 40 et 50 % du PIB37. Dans un tel contexte, il est évident que les différents confinements ont eu des conséquences économiques négatives sur le secteur informel, même si les pouvoirs publics ont pris des mesures sociales pour réduire les répercussions de la pandémie sur le plan économique. C’est ce qui semble expliquer que les mesures de confinement ne soient pas respectées par la population, notamment dans les quartiers périphériques sans éclairage public. Dans ces quartiers, la population a opté pour des mesures de contournement : fonctionne- ment des débits de boissons avec fermeture des portes principales, fonctionnement en cachette de certains motels, ouverture de certains petits commerces à l’abri des forces de l’ordre.

Conclusion

Le Gabon, avec une économie dépendante majoritairement des revenus pétroliers, s’organise tant bien que mal face à la pandémie. Des organes décisionnels ont été mis en place : le comité de pilotage du plan de veille et de riposte, le comité national de coordination technique de la riposte, le comité scientifique de riposte, la cellule de veille et de riposte au Sénat. Ces organes sont aidés par l’implication des partis politiques et des leaders religieux. Des mesures de prévention individuelle et collective ont été diffusées : la fermeture des frontières terrestres, aériennes et maritimes, l’interdiction des rassemblements, la fermeture des établissements d’enseignement, la fermeture des débits de boissons et autres commerces, la limitation des déplacements non essentiels et le confinement de la population ont été décidés par les pouvoirs publics. Un dépistage massif par PCR de la population est organisé en plus des mesures sociales en faveur des populations sans revenus et de la préservation du pouvoir d’achat des travailleurs.

Ces mesures suffiront-elles à contenir la pandémie de la Covid-19 au Gabon ? En tout état de cause, avec 59 671 prélèvements, 6 433 cas confirmés, 46 décès et 4 034 malades guéris au 21 juillet 2020, les pouvoirs publics semblent avoir pris la mesure de l’étendue du danger. Mais la lutte contre la pandémie au Gabon passe aussi par la responsabilité à la fois des populations et du personnel de santé. La transposition du modèle occidental dans la lutte contre la pandémie (confinement partiel, couvre-feu, confinement total, déconfinement, fermeture des frontières, etc.) contraste avec la réalité de terrain au Gabon. L’économie informelle est prépondérante en plus de l’existence des bidonvilles dans les villes. Dans ce cas, les mesures de confinement ont du mal à être respectées par des populations, qui ont le choix entre « être confinées et mourir de faim » et « sortir pour travailler en informel » afin de satisfaire les besoins essentiels de la vie. La seule mesure possible semble alors être le port de masques à l’extérieur par la population comme au Japon ou en Corée, la distanciation sociale n’étant pas possible à respecter en permanence au quotidien.

1 Luc Lenoir, « Coronavirus : quand l’Afrique dénonce la maladie des blancs », Le Figaro, 20 mars 2020 [En ligne : https://www.lefigaro.fr/coronavirus

2 Dominique Kerouedan, « La santé en Afrique : pourquoi la France et l’Europe devraient être plus engagées », Field Actions Science Reports Online, 4

3 Centre d’études stratégiques de l’Afrique « Le coronavirus se répand en Afrique », 10 août 2020 [En ligne : https://africacenter.org/fr/spotlight/le

4 « Pandémie de Covid-19 en Afrique », Wikipedia [En ligne : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pand%C3%A9mie_de_Covid-19_en_Afrique].

5 Ibid.

6 Situation Covid-19 au Gabon : http://monitoring-covid19gabon.ga/.

7 « Le manque de tests dans certains pays brouille les chiffres du coronavirus en Afrique », RFI, 7 août 2020 [En ligne : https://www.rfi.fr/fr/

8 « Covid-19 en Afrique : les chiffres reflètent-ils la réalité ? », La Tribune, 31 juillet 2020 [En ligne : https://www.latribune.fr/opinions/

9 Hénock Blaise Nguendo-Yongsi et al., « Riposte africaine à la pandémie du Covid-19 : une urgence sanitaire pour les villes », International Journal

10 Euloge Makita-Ikouaya, « Géopolitique des rapports de santé dans l’agglomération librevilloise : esquisse d’intégration spatiale et de

11 André Audoynaud, Le Docteur Schweitzer et son hôpital à Lambaréné, Paris, L’Harmattan, 2005, p. 181.

12 Caisse Nationale d’Assurance Maladie et de Garantie Sociale, « Nos prestations » [En ligne : http://www.cnamgs.net/node/21].

13 « Assurance maladie : la CNAMGS veut enrôler 100 % des Gabonais d’ici 2022 », gabonactu.com, 22 mai 2019 [En ligne : https://gabonactu.com/

14 Ministère de la Santé, Carte sanitaire 2017, 2018.

15 Ministère de la Santé, Annuaire statistique 2017, 2018.

16 Ministère de la Santé, Tableau de bord 2017, 2018.

17 L’Union, 27 mars 2008.

18 L’Union, 27 mars 2008.

19 Ibid.

20 Ibid.

21 Perrine Demeaux, « Vers un observatoire local de la santé à Nanterre », Espace populations sociétés, 2/3 (2006), p. 417-422.

22 « E-Gouvernement 2020 : le Gabon dans le top 3 en Afrique subsaharienne », VoxPopuli, 17 juillet 2020 [En ligne : https://vxp241.com/2020/07/17/

23 Pierre Moukeli Mbindzoukou, Marcien Mackaya, « Overview of E-Government Development in Gabon », International Journal of Emerging Trends & Tec

24 Source : Agence Gabonaise d’Études et d’Observations Spatiales (AGEOS) partenaire technique du COPIL en matière de cartographie de la Covid-19 au

25 Source : Agence Gabonaise d’Études et d’Observations Spatiales (AGEOS) partenaire technique du COPIL en matière de cartographie de la Covid-19 au

26 L’Union, 18 mai 2020.

27 « Coronavirus : le chef de l’OMS appelle l’Afrique à se préparer », ONU Info, 22 février 2020 [En ligne : https://news.un.org/fr/story/2020/02/

28 L’Union, 4-5 avril 2020.

29 L’Union, 27 mars 2020.

30 Nation Unies Gabon, « La réponse du système des Nations unies au Gabon face à la pandémie du Covid-19 », 8 mai 2020 [En ligne : https://gabon.un.

31 « Cette année, au Gabon comme ailleurs, la Journée mondiale de lutte contre le paludisme va-t-elle souffrir de la concurrence du Covid-19 ? », La

32 Ibid.

33 Blandine Obono Allo’o, Sécurité sanitaire au sein des espaces transfrontaliers au Gabon : cas de la frontière terrestre d’Eboro-Ntem, Mémoire de

34 L’Union, 1er mai 2020.

35 L’Union, 29 avril 2020.

36 Ibid.

37 « Secteur informel / Afrique centrale : le Gabon, champion », L’Union, 13 juillet 2017 [En ligne : https://www.union.sonapresse.com/gabon-economie/

Notes

1 Luc Lenoir, « Coronavirus : quand l’Afrique dénonce la maladie des blancs », Le Figaro, 20 mars 2020 [En ligne : https://www.lefigaro.fr/coronavirus-quand-l-afrique-denonce-la-maladie-des-blancs-20200328].

2 Dominique Kerouedan, « La santé en Afrique : pourquoi la France et l’Europe devraient être plus engagées », Field Actions Science Reports Online, 4 (2012) [En ligne : https://journals.openedition.org/factsreports/1238].

3 Centre d’études stratégiques de l’Afrique « Le coronavirus se répand en Afrique », 10 août 2020 [En ligne : https://africacenter.org/fr/spotlight/le-coronavirus-se-repand-en-afrique/].

4 « Pandémie de Covid-19 en Afrique », Wikipedia [En ligne : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pand%C3%A9mie_de_Covid-19_en_Afrique].

5 Ibid.

6 Situation Covid-19 au Gabon : http://monitoring-covid19gabon.ga/.

7 « Le manque de tests dans certains pays brouille les chiffres du coronavirus en Afrique », RFI, 7 août 2020 [En ligne : https://www.rfi.fr/fr/afrique/20200807-coronavirus-en-afrique-le-nombre-cas-serait-sous-estime-afrique-sud-nigeria-ghana-a].

8 « Covid-19 en Afrique : les chiffres reflètent-ils la réalité ? », La Tribune, 31 juillet 2020 [En ligne : https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/Covid-19-en-afrique-les-chiffres-refletent-ils-la-realite-853685.html].

9 Hénock Blaise Nguendo-Yongsi et al., « Riposte africaine à la pandémie du Covid-19 : une urgence sanitaire pour les villes », International Journal of Advanced Studies and Research in Africa, 9/2 (2020), p. 26-30.

10 Euloge Makita-Ikouaya, « Géopolitique des rapports de santé dans l’agglomération librevilloise : esquisse d’intégration spatiale et de rationalisation des formations sanitaires modernes et traditionnelles », Connaissances et savoirs, 2016, p. 179.

11 André Audoynaud, Le Docteur Schweitzer et son hôpital à Lambaréné, Paris, L’Harmattan, 2005, p. 181.

12 Caisse Nationale d’Assurance Maladie et de Garantie Sociale, « Nos prestations » [En ligne : http://www.cnamgs.net/node/21].

13 « Assurance maladie : la CNAMGS veut enrôler 100 % des Gabonais d’ici 2022 », gabonactu.com, 22 mai 2019 [En ligne : https://gabonactu.com/assurance-maladie-cnamgs-veut-enroler-100-gabonais-dici-2022/].

14 Ministère de la Santé, Carte sanitaire 2017, 2018.

15 Ministère de la Santé, Annuaire statistique 2017, 2018.

16 Ministère de la Santé, Tableau de bord 2017, 2018.

17 L’Union, 27 mars 2008.

18 L’Union, 27 mars 2008.

19 Ibid.

20 Ibid.

21 Perrine Demeaux, « Vers un observatoire local de la santé à Nanterre », Espace populations sociétés, 2/3 (2006), p. 417-422.

22 « E-Gouvernement 2020 : le Gabon dans le top 3 en Afrique subsaharienne », VoxPopuli, 17 juillet 2020 [En ligne : https://vxp241.com/2020/07/17/e-gouvernement-2020-le-gabon-dans-le-top-3-en-afrique-subsaharienne/].

23 Pierre Moukeli Mbindzoukou, Marcien Mackaya, « Overview of E-Government Development in Gabon », International Journal of Emerging Trends & Technology in Computer Science, 6/3 (2017), p. 78-87.

24 Source : Agence Gabonaise d’Études et d’Observations Spatiales (AGEOS) partenaire technique du COPIL en matière de cartographie de la Covid-19 au Gabon [En ligne : http://monitoring-covid19gabon.ga/].

25 Source : Agence Gabonaise d’Études et d’Observations Spatiales (AGEOS) partenaire technique du COPIL en matière de cartographie de la Covid-19 au Gabon [En ligne : http://monitoring-covid19gabon.ga/].

26 L’Union, 18 mai 2020.

27 « Coronavirus : le chef de l’OMS appelle l’Afrique à se préparer », ONU Info, 22 février 2020 [En ligne : https://news.un.org/fr/story/2020/02/1062401].

28 L’Union, 4-5 avril 2020.

29 L’Union, 27 mars 2020.

30 Nation Unies Gabon, « La réponse du système des Nations unies au Gabon face à la pandémie du Covid-19 », 8 mai 2020 [En ligne : https://gabon.un.org/fr/44963-la-reponse-du-systeme-des-nations-unies-au-gabon-face-la-pandemie-du-Covid-19].

31 « Cette année, au Gabon comme ailleurs, la Journée mondiale de lutte contre le paludisme va-t-elle souffrir de la concurrence du Covid-19 ? », La Libreville, 25 avril 2020 [En ligne : https://lalibreville.com/cette-annee-au-gabon-comme-ailleurs-la-journee-mondiale-de-lutte-contre-le-paludisme-va-t-elle-souffrir-de-la-concurrence-du-Covid-19/].

32 Ibid.

33 Blandine Obono Allo’o, Sécurité sanitaire au sein des espaces transfrontaliers au Gabon : cas de la frontière terrestre d’Eboro-Ntem, Mémoire de Master, Géographie, Université Omar-Bongo, p. 30.

34 L’Union, 1er mai 2020.

35 L’Union, 29 avril 2020.

36 Ibid.

37 « Secteur informel / Afrique centrale : le Gabon, champion », L’Union, 13 juillet 2017 [En ligne : https://www.union.sonapresse.com/gabon-economie/secteur-informel-afrique-centrale-le-gabon-champion-16294].

Illustrations

Fig. 1. Évolution épidémiologique au 21 juillet 202024

Fig. 1. Évolution épidémiologique au 21 juillet 202024

Fig. 2. Évolution des cas au 21 juillet 2020 par province et densité de la population25

Fig. 2. Évolution des cas au 21 juillet 2020 par province et densité de la population25

Fig. 3. Localisation des structures de soins prenant en charge les malades de la Covid-19 au Gabon

Fig. 3. Localisation des structures de soins prenant en charge les malades de la Covid-19 au Gabon

Citer cet article

Référence papier

Euloge Makita-Ikouaya, « Le Gabon face à la Covid-19 : mesures sanitaires et conséquences socio-économiques », Revue du Rhin supérieur, 2 | 2020, 97-116.

Référence électronique

Euloge Makita-Ikouaya, « Le Gabon face à la Covid-19 : mesures sanitaires et conséquences socio-économiques », Revue du Rhin supérieur [En ligne], 2 | 2020, mis en ligne le 01 novembre 2020, consulté le 28 mars 2024. URL : https://www.ouvroir.fr/rrs/index.php?id=140

Auteur

Euloge Makita-Ikouaya

Euloge Makita-Ikouaya est enseignant-chercheur au département de Géographie à l’Université Omar-Bongo (Gabon) et membre du Centre de Recherche en Géosciences Politiques et Prospective. Il est également membre du Groupe Interdisciplinaire de Santé Publique et Épidémiologie (GISPE) et du Réseau africain de Formation et de Recherche en Santé et Territoires (RAFORST). Ses travaux de recherche portent sur l’analyse du système de soins en Afrique subsaharienne.

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